Le parquet de Paris a ouvert lundi une information judiciaire pour "assassinat" à caractère antisémite après le meurtre vendredi à Paris d'une octogénaire juive, a indiqué une source judiciaire.
Deux suspects vont être présentés dans la journée à un juge d'instruction en vue de leur éventuelle mise en examen, notamment pour "assassinat à raison de l'appartenance vraie ou supposée de la victime à une religion et sur personne vulnérable", a-t-on appris de même source.
La dame de 85 ans vivait seule. Le parquet, qui a également retenu les chefs de "vol aggravé" et de "dégradation du bien d'autrui par un moyen dangereux pour les personnes", a requis leur placement en détention provisoire. Le corps de Mireille Knoll, 85 ans, avait été retrouvé en partie carbonisé vendredi peu avant 19h dans son appartement du 11e arrondissement, où elle vivait seule.
Rescapée de la Shoah. Les policiers se sont rapidement orientés vers la piste criminelle, après la découverte de plusieurs départs de feu dans l'appartement et de traces de coups de couteau sur le corps de la victime, selon une source proche du dossier. Mireille Knoll, née en 1932 à Paris, avait échappé de justesse à la rafle antisémite du Vel d'Hiv' de juillet 1942, en s'enfuyant de Paris avec sa mère, a raconté son fils.
"Ma mère le connaissait très bien". À la police, un membre de la famille de Mireille Knoll a dit soupçonner un voisin qui avait l'habitude de venir la voir et était passé dans l'appartement dans la journée. C'est cet homme, né en 1989, qui a été placé samedi en garde à vue. "Apparemment ma mère le connaissait très bien", a déclaré le fils de la victime. Selon une source policière, il était connu des services de police pour des affaires de viol et d'agression sexuelle. Selon cette source, le second suspect, âgé de 21 ans et connu pour des faits de vols avec violences, se trouvait dans l'immeuble de Mireille Knoll le jour du meurtre.
Marche blanche. Le président du Consistoire israélite, Joël Mergui, a salué la "réactivité" des enquêteurs et du parquet après que le mobile antisémite a été retenu. Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), Francis Kalifat, a exprimé sur Twitter son "soulagement" que ce motif antisémite ait été retenu, mais aussi sa "colère" et son "inquiétude face à une telle barbarie". Le Crif et plusieurs autres organisations ont appelé à participer à une "marche blanche" en hommage à la victime mercredi après-midi à Paris.
#Actu#Antisemitisme - Soulagement suite à la retenue du caractère antisémite du meurtre de #MireilleKnoll mais colère et inquiétude face à une telle barbarie, en France, en 2018
— Francis Kalifat (@FrancisKalifat) 26 mars 2018
Le meurtre de Sarah Halimi en avril 2017. Cette affaire suscite une vive émotion au sein de la communauté juive française, déjà mobilisée ces derniers mois après le meurtre de Sarah Halimi, une juive orthodoxe de 65 ans tuée à Paris par son voisin en avril 2017. Après des mois de bras de fer judiciaire, le caractère antisémite de ce meurtre a finalement été retenu début mars par la juge d'instruction.
À Jérusalem, Jean-Yves Le Drian a fait part de son émotion
En visite en Israël, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a fait part de son émotion lundi à Jérusalem après le meurtre d'une octogénaire survivante de la Shoah à Paris, jugeant la piste antisémite "plausible". "J'ai eu un moment d'émotion quand je quittais la visite très émouvante de Yad Vashem (mémorial de la Shoah à Jérusalem, ndlr) et j'ai appris qu'une rescapée de la Shoah avait été assassinée à Paris", a-t-il déclaré au début de son entretien avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. "On ne peut pas dire à cette heure les raisons qui ont provoqué cet assassinat, mais l'hypothèse d'un crime antisémite est plausible. Cela nous rappelle le caractère fondamental et permanent (du) combat" contre l'antisémitisme, a-t-il ajouté.