Quelques heures après les annonces d'Édouard Philippe sur l'hôpital, Rémi Salomon, chef de service en pédiatrie à Necker, a affiché sa déception, mercredi soir, dans le Grand Journal du soir d'Europe 1. Selon lui, cette série de mesures "n'est pas à la hauteur", et le Premier ministre "n'a pas perçu le cœur du problème : des services en manque de personnel". Face à ce constat, Rémi Salomon lance un appel de soutien à l'ensemble des Français.
"J'appelle les usagers à signer la pétition sur change.org pour dire qu'il faut un plan d'urgence pour l'hôpital public. On en est à 200.000, on doit être à trois millions !", tonne le professeur, déjà ardent défenseur de la mobilisation inédite qui a réuni dans la rue plus de 25% des médecins hospitaliers le 14 novembre dernier. "Humainement, on ne peut plus continuer comme ça. Les Français doivent savoir que l'on est entré dans une spirale infernale. C'est vrai que le problème dure depuis des années, que l'on paye une politique d'austérité des 10-15 dernières années, mais c'est une maladie chronique et on est arrivé en état de choc. Et quand on en est là, on ne pose pas de goutte-à-goutte au patient, on lui met une voie centrale et une perfusion et on remplit largement, sinon le cœur lâche."
Il aurait fallu "trois milliards sur trois ans"
En fin de matinée, mercredi, Édouard Philippe a détaillé ces mesures pour l'hôpital : 1,5 milliard d'euros supplémentaires sur trois ans, une prime de 800 euros pour 40.000 infirmiers et aides-soignants d’Île-de-France et une reprise d'un tiers de la dette de l'hôpital dès 2020. "Si on veut réellement attirer les professionnels, il faut améliorer les conditions de travail", martèle Rémi Salomon. Concrètement, en lieu et place de la rallonge d'un milliard et demi d'euros accordé par le gouvernement sur trois ans, il estime qu'il aurait fallu "au minimum trois milliards [d'euros] sur trois ans", soit le double.
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Concernant l'annonce d'une prime de 800 euros annuels, elle ne trouve pas grâce non plus aux yeux du chef de service, qui la trouve "insuffisante". "En France, les infirmières sont 10% en-dessous du salaire moyen. Dans le reste de l'Europe, c'est 10% au-dessus. Nous voulons simplement revenir à la moyenne". Il ajoute : la "prime n'est pas une revalorisation salariale, ça ne compte pas pour la retraite, et c'est transitoire par définition."
Enfin, sur la reprise de 10 milliards de dettes de l'hôpital sur trois ans à partir de 2020, soit un tiers du total, le spécialiste reste mécontent. "Au début des années 2000, l'État a mis 10 milliards d'euros sur l'investissement à l'hôpital", rappelle-t-il. "Mais comme la dette arrive par l'enveloppe économique qui baisse chaque année, on va refabriquer de la dette ! On a déjà mis 10 milliards sur la table il y a plus de quinze ans, et regardez où l'on en est aujourd'hui !" Une nouvelle manifestation des personnels hospitaliers est prévue le mardi 17 décembre prochain, même si certains d'entre eux pourraient se joindre à la grève du 5 décembre prochain.