L'ancien juge antiterroriste Marc Trévidic publie chez Flammarion "Le Roman du terrorisme" 3:15
  • Copié
Romain David , modifié à
Invité lundi d'Europe Soir, l'ancien juge antiterroriste Marc Trévidic a estimé que les attaques terroristes qui ont frappé la France ces dernières semaines n'avaient plus rien à voir avec les attaques très organisées des années 2000 et du début des années 2010, souvent pilotées depuis l'étranger.
INTERVIEW

Ancien juge antiterroriste, Marc Trévidic publie Le Roman du terrorisme chez Flammarion, un ouvrage dans lequel il brosse une histoire du terrorisme, depuis la Perse médiévale jusqu’à nos jours. Et lui-même a vu en tant que magistrat les formes de terrorisme qui se sont abattues sur les pays occidentaux, et notamment la France, sensiblement évoluer en deux décennies. "Nous sommes passés d’un terrorisme organisé à un terrorisme pulsionnel, haineux", a-t-il relevé lundi, au micro d’Europe Soir.

"Aujourd’hui nous avons un terrorisme pulsionnel. Ça n’est plus quelque chose d’organisé, la haine s’exprime sans logique, sans stratégie. C’est un terrorisme déconnecté d’une stratégie globale", poursuit le magistrat qui se remémore le parcours des djihadistes auxquels il a pu être confronté dans les années 2000, en début de carrière. "J’ai connu un terrorisme très organisé. Les candidats djihadistes étaient envoyés dans les camps d’Al-Qaïda en Afghanistan. Là, ils étaient formés pendant un an et demi, avant d’être renvoyés en Europe comme agents dormants."

"Des extrémistes chauffés à blanc"

Les interventions militaires au Levant et en Afrique sub-saharienne ont mis fin à ce type d'opération en affaiblissant les principaux groupes terroristes. Aujourd’hui, les attaques sont essentiellement commises par "des extrémistes chauffés à blanc", qui se sont radicalisés en ligne ou lors d’un séjour en prison, et qui éprouvent le besoin de passer à l’acte, explique Marc Trévidic, face à une actualité ou à un évènement particulier. Il évoque notamment le meurtre du professeur Samuel Paty, qui avait montré en classe des caricatures publiées par Charlie Hebdo, alors que s’était ouvert le procès de l’attentat de 2015 contre l’hebdomadaire satirique. "La question des caricatures est un sujet très sensible. On l’a vu avec Charlie Hebdo, on l’avait déjà vu au Danemark."

"Ce genre d’attaque fait peur, mais les terroristes sont moins puissants, car ils font des choses dans tous les sens, quand un terrorisme plus rationnel est capable d’organiser des opérations plus lourdes", souligne encore Marc Trévidic. "Les services de renseignement occidentaux sont maintenant tellement perfectionnés que pour arriver à faire un attentat très organisé, il faudra du temps au groupe Etat islamique, car il faut qu'un groupe soit très fort localement pour arriver à s'exporter", ajoute-t-il.