La Chancellerie a annoncé vendredi que le protocole d'accord pour les prisons, que le syndicat majoritaire Ufap-Unsa va signer, serait "rapidement" appliqué, après douze jours d'un conflit qui a paralysé un grand nombre de prisons.
Alors que les deux autres syndicats représentatifs, FO et la CGT, qui représentent respectivement 30% et 15% des surveillants, ont rejeté cet accord, l'Ufap-Unsa affirme avoir pris ses "responsabilités" et juge que le texte est une "base d'évolution profonde de notre système carcéral, où la sécurité et l'ordre doivent redevenir des valeurs fortes", dans un communiqué. Ce projet d'accord "traduit une volonté de changer le fonctionnement des prisons devenues de véritables coupe-gorge et zones de non droit", relève le syndicat majoritaire (environ 40%).
#Prisons l’Ufap Unsa signe l’accord. Malgré le refus de signer des deux autres syndicats FO et CGT Penitentiaire, l’accord s’applique. Entre la menace de sanctions, la fatigue et l’accord le mouvement devrait considérablement faiblir pic.twitter.com/BDPanIfr3J
— Salomé Legrand (@Salome_L) 26 janvier 2018
Des mesures pour la gestion des détenus radicalisés. La garde des Sceaux Nicole Belloubet a proposé jeudi aux trois grands syndicats un projet d'accord censé répondre à la colère des 28.000 surveillants. Il comprend trois volets dont la sécurité : 1.500 places de prison dont 450 dédiées dès cette année aux détenus radicalisés et les plus violents. Des quartiers totalement étanches du reste des centres de détention au sein desquels les prisonniers pourront être menottés à chacun de leur déplacement sont également prévus.
Un volet emploi est aussi compris dans l'accord avec la création de 1.100 postes et une enveloppe de six millions et demi d'euros pour attirer et fidéliser les surveillants dans les établissements dits "difficiles". Enfin, un volet indemnité avec trois primes revalorisées dont celle de dimanche et jour férié augmentée de dix euros : elle passe ainsi de 26 à 36 euros. Les mesures proposées "entreront rapidement en vigueur", a indiqué la Chancellerie. Le jour-même, la CGT (15%) et FO (30%) ont annoncé qu'elles ne signeraient pas le document, déplorant l'absence de propositions sur l'évolution statutaire des personnels de la catégorie C à B de la fonction publique.
La garde des Sceaux avait défendu sur Europe 1 des "propositions très sérieuses". Le mouvement, très suivi cette semaine, avait semblé faiblir vendredi matin, avec 62 établissements sur 188 touchés à des degrés divers (retards ou refus de prise de service, barrages filtrants ou blocages), contre 116 prisons affectées jeudi, selon les chiffres de la Direction de l'administration pénitentiaire (DAP). Nicole Belloubet avait défendu vendredi matin sur la radio Europe 1 "des propositions très sérieuses" et espéré "une prise de responsabilité, une prise de conscience" des surveillants, et une reprise rapide du travail.
Fo-Pénitentiaire parle de "haute trahison". "C'est une haute trahison que d'avoir signé ce protocole. On était à l'aube d'un changement radical (...) et l'Unfa-Unsa vient de tuer cet espoir, c'est inacceptable", a réagi vendredi Emmanuel Baudin le secrétaire général de FO-Pénitentiaire, sur BFMTV. Même son de cloche chez la CGT, qui dénonce un "accord minoritaire", signé par un seul des trois grands syndicats ne représentant pas à lui seul 50%.
Quel avenir pour le mouvement des surveillants pénitentiaires ? Malgré la signature de l'Ufap Unsa, tout ne rentrera pas forcément dans l'ordre dès samedi. FO et CGT veulent continuer la mobilisation mais ils savent qu'entre la fatigue et la menace de sanctions, ils ne peuvent plus organiser de blocages durs comme ces derniers jours. Ils ont néanmoins déjà pensé à d'autres moyens comme les arrêts maladies collectifs. Il peut donc encore y avoir plusieurs soubresauts et dysfonctionnements dans certaines prisons, mais le mouvement devrait être beaucoup plus ténu.