Procès de France Télécom : les ex-dirigeants condamnés à 4 mois de prison ferme, amende maximale pour l'entreprise
Les peines dans le procès de France Télécom ont été prononcées : les ex-dirigeants sont condamnés à 4 mois de prison ferme et 15.000 euros d'amende. L'entreprise, elle, est condamnée à une amende de 75.000 euros, la peine maximale. L'ex-PDG fait appel de cette condamnation.
France Télécom et ses anciens dirigeants, dont l'ex-PDG Didier Lombard, ont été condamnés vendredi à Paris pour "harcèlement moral" , dans un procès inédit qui s'est tenu du 6 mai au 11 juillet, dix ans après plusieurs suicides de salariés. Au cœur du procès, un harcèlement moral institutionnel qui se serait propagé du sommet à l'ensemble de l'entreprise sans qu'il y ait de lien direct entre les auteurs et les victimes.
Didier Lombard fait appel
L'entreprise France Télécom - devenue Orange en 2013 - est condamnée en tant que personne morale à l'amende maximale de 75.000 euros. Les anciens dirigeants, l'ex-PDG Didier Lombard, l'ex-numéro 2 Louis-Pierre Wenès et l'ex-DRH Olivier Barberot, ont eux été condamnés à un an de prison dont quatre mois ferme et huit mois avec sursis, et 15.000 euros d'amende, pour avoir mis en place d'une politique de réduction des effectifs "jusqu'au-boutiste" sur la période 2007-2008.
Peu après cette annonce, l'avocat de Didier Lombard, Jean Veil, a déclaré faire appel de sa condamnation. C'"est une faute de droit complète, c'est une analyse politique et de politique démagogique. Evidemment nous allons interjeter appel de cette décision", a-t-il précisé à la sortie du tribunal.
"Les moyens choisis pour atteindre les 22.000 départs étaient interdits"
Au cœur du procès, qui s'intéressait à la période 2007-2010: les plans Next et Act, qui visaient à transformer France Télécom en trois ans, avec notamment l'objectif de 22.000 départs et 10.000 mobilités sur un total de 120.000 salariés. "Les moyens choisis pour atteindre les 22.000 départs étaient interdits", a jugé le tribunal. C'était une réduction des effectifs "à marche forcée". Le volontariat des départs, mis en avant par les prévenus tout au long du procès, qui s'est tenu du 6 mai au 11 juillet, n'était qu'un "simple affichage".
Les trois ex-dirigeants ont mis la "pression sur l'encadrement", qui "a répercuté cette pression" sur les agents. Ils ont mis en place "un plan concerté pour dégrader les conditions de travail des agents afin d'accélérer leur départs". Cette politique "a créé un climat anxiogène". Les prévenus ont été revanche été relaxés sur la période postérieure à 2008.
39 cas examinés, dont 19 suicides
Raphaël Louvradoux, fils d’un salarié de l'entreprise qui s’était suicidé devant les locaux de France Télécom à Mérignac en 2011 après avoir été changé plusieurs fois de postes et de lieu de travail, témoignait ce vendredi matin au micro d'Europe 1 . Il estimait les peines encourues très faibles au regard de "la gravité de ce qui s'est passé" et pensait que les dirigeants n'iraient pas en prison.
Pour lui, le procès devait aussi servir d'exemple pour que de telles situations n'arrivent plus et il souhaitait "que les 'Didier Lombard' qu’il y a dans d’autres entreprises sachent qu’ils risquent quelque chose".
Au cours du procès, le tribunal s'est penché sur les cas de 39 salariés, retenus par les juges d'instruction lors de l'enquête : 19 se sont suicidés, 12 ont tenté de le faire, et 8 ont subi un épisode de dépression ou un arrêt de travail.