Après la stupeur, l'espoir. Reconstruire la cathédrale Notre-Dame de Paris, c'est possible, ça s'est même déjà vu. La cathédrale de Chartres a brûlé en 1836, celle de Nantes en 1972. Toutes les deux sont bien debout aujourd'hui.
Le cas de la cathédrale de Reims
La cathédrale de Reims, siège du sacre des rois de France, est peut-être le cas le plus similaire à celui de Paris. Le 19 septembre 1914, deux mois après le début de la Première Guerre mondiale, la charpente en chêne de l'édifice gothique prend feu après d'intenses bombardements allemands. La toiture fond, le plomb se déverse sur les gargouilles, et les bas-reliefs explosent. La cathédrale n'est plus qu'une silhouette squelettique, recouverte de cendres. Pendant tout le conflit, l'édifice martyr, dont les tours culminent à 81 mètres, est régulièrement bombardé.
Mais dès la fin de la guerre, la reconstruction commence, financée par l'État et des mécènes privés. "Pendant un moment, il y a eu un plafond provisoire. La charpente a pu être refaite dès les années 20. Dès 1927, la nef avait été ouverte", raconte l'historien Patrick Demouy, interrogé par Europe 1. Si ça a été si rapide à Reims, c'est qu'on a choisi le béton armé pour refaire la charpente. Cette remarquable structure, plus légère et ininflammable, est constituée de petits éléments préfabriqués en béton armé, reliés par des clavettes en chêne pour garantir la souplesse de l'ensemble.
Le cas de la cathédrale de Strasbourg
La question de la charpente se posera lors de la reconstruction de Notre-Dame. Faudra-t-il reconstruire à l'identique en utilisant du bois de chêne - celui qui a brûlé lundi soir datait du 13ème siècle - ou faudra-t-il opter pour des matériaux modernes ? De son côté, Strasbourg a choisi... les deux. Après l'incendie de la cathédrale en 1870, lors du conflit franco-prussien, la charpente est refaite en bois. Puis 100 ans plus tard, elle est protégée par des murs coupe-feu. "La restauration, ce n'est que des compromis, il n'y a pas de solution idéale. À un moment donné, il faut faire des choix. Ici, à Strasbourg, cela a été de cloisonner cette charpente de la nef en trois parties, pour limiter la propagation en cas d'incendie", décrit Eric Salmon, directeur technique de l'œuvre Notre-Dame.
À Paris, les monuments historiques ont donné un délai : Notre-Dame sera réparée en 15 ans. Emmanuel Macron, lui, s'est fixé "cinq années". Vu l'ampleur des donations, l'argent ne va pas manquer. Reste à faire les choix techniques qui s'adapteront à cette durée.
Et le Parlement de Bretagne ?
Ce n'est pas une cathédrale, mais le Parlement de Bretagne, à Rennes, est lui aussi un exemple de résilience. Dans la nuit du 4 au 5 février 1994, à la suite d'une manifestation de marins-pêcheurs, l'édifice est touché par une fusée de détresse, qui embrase la charpente du 17ème siècle, qui s'écroule et détruit plusieurs salles et documents historiques. Il faudra pas moins de dix ans, 55 millions d'euros et la mobilisation d’une cinquantaine d'entreprises pour restaurer l'un des joyaux du patrimoine breton.
Marie-Line Quéro, était à l'époque ingénieure du patrimoine à la Drac de Bretagne, estime d'après son expérience qu'il faudra "20 ans, 30 ans" pour rebâtir Notre-Dame. "La reconstruction, ce n'est pas une course contre la montre. Sinon, on ne prend pas les bonnes décisions. Je me souviens de toiles que l'on avait descendues. Quand il a fallu les replacer, si l'architecte n'avait pas dit que c'était par le dessus du Parlement que l'on devait les passer, et non pas par en-dessous, on n'aurait pas pu les remettre. Il y a urgence à ne pas se précipiter", enjoint la spécialiste au micro d'Europe 1.