La pénurie de carburant en France continue de prendre de l'ampleur et génère toujours autant de tensions dans les stations-service. Si les files d'attente à la pompe se rallongent, certains véhicules de service ont désormais le droit à un accès prioritaire. À première vue, rien de compliqué : les services à la personne qui travaillent dans l'urgence sont dans l'ensemble considérées comme prioritaires. En pratique néanmoins, cette volonté du gouvernement reste floue. Est-ce que tous les véhicules catégorisés comme "indispensables" ont droit de passer devant pour faire le plein ?
À chaque département ses propres règles
Pompiers, ambulanciers, médecins et policiers… Sur l'ensemble du territoire, les véhicules de secours sont directement étiquetés prioritaires, afin de pouvoir agir même dans l'urgence. Pourtant, sur le reste, le gouvernement laisse le soin aux préfectures de trouver la bonne stratégie à adopter pour chaque territoire. "Ce n'est pas la même chose de faire la liste de priorités dans le Pas-de-Calais qu'en Seine-et-Marne", a pointé le ministre délégué chargé des transports Clément Beaune mardi 11 octobre sur BFM TV.
"Il y a des départements où c'est le transport scolaire qui est le plus critique et où il y a des besoins les plus forts, des départements où ce sont les taxis qui font les transports sanitaires…"
En effet, si les départements d'Île-de-France sont très fortement touchés par les difficultés d'approvisionnement des stations-essence, ce n'est pas autant le cas dans certains départements plus ruraux. Ainsi, plusieurs départements lourdement touchés par les pénuries ont pris des mesures qu'ils considèrent proportionnées.
Dans l'Aisne par exemple, des files prioritaires ont été mises en place de 7h30 à 18 heures dans certaines stations de carburant pour les personnes dépositaires de l'autorité publique, les services d'urgence et de secours et le personnel médical et paramédical. Beaucoup plus généreux, le département du Nord demande aux stations-service de mettre en place un accès prioritaire, sur des créneaux définis, à de nombreux services. Dans une liste non exhaustive, on retrouve les forces de sécurité intérieure, les pompes funèbres, les techniciens vétérinaires des services de l'État, le transport d'organes, les soignants ou encore les taxis conventionnés pour le transport de malades.
La préfecture du Var a elle aussi publié une longue liste détaillée de services qu'elle juge prioritaires, comprenant les douanes, les engins d'assistance aéroportuaires, les véhicules liés aux traitements des ordures ménagères ou encore les véhicules de La Poste, EDF et GRDF. Ces mesures sont en place jusqu'au 19 octobre dans ce département du sud-est.
Pourquoi l'approvisionnement reste difficile pour les services prioritaires
Dans les faits, l'approvisionnement en carburant reste difficile pour les services prioritaires. D'abord, parce que plus la préfecture gonfle les effectifs des accès prioritaires, moins cet accès est efficace. Mais aussi, car certains personnels jugent la situation trop délicate pour eux. "Avoir des accès prioritaires, c'est très compliqué", a expliqué le président du Syndicat national des infirmiers libéraux John Pinte sur BFM Île-de-France. "Aller doubler une file où il y a des gens qui attendent depuis deux heures, ça crée des tensions voire des incivilités".
>> LIRE AUSSI - Carburant : «Il est temps que ça s'arrête», ces professionnels inquiets pour leur activité
Beaucoup demandent aujourd'hui de réquisitionner des stations réservées aux professions prioritaires, afin d'éviter des débordements. Sur l'ensemble du territoire, les usagers sont appelés à faire preuve de civisme entre eux et envers les véhicules prioritaires. Depuis le début de cette crise, de nombreux débordements ont été recensés à la pompe, parfois allant jusqu'à la violence physique.
Jeudi après-midi, les aides à domicile intervenant chez les personnes âgées ont demandé à également avoir un accès prioritaire aux stations-service. Plusieurs organisations professionnelles du secteur craignent en effet que certains seniors restent "alités" à cause de la pénurie de carburant. Les taxis et les VTC avaient déjà demandé des accès prioritaires à la pompe lundi.