Saint-Étienne-du-Rouvray : le récit glaçant des religieuses otages

Sœur Danielle a réussi à s'échapper de l'église et à prévenir la police.
Sœur Danielle a réussi à s'échapper de l'église et à prévenir la police. © CHARLY TRIBALLEAU / AFP
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Dans "La Vie", les trois religieuses prises en otage, mardi, dans leur église de Saint-Étienne-du-Rouvray, racontent les circonstances glaçantes de l'attentat qui a coûté la vie au père Hamel.

Elles n’oublieront jamais ce mardi 26 juillet 2016, quand, vers 9h30 du matin, deux terroristes ont fait irruption dans l’église de Saint-Étienne-du-Rouvray, près de Rouen, tuant le père Jacques Hamel et blessant grièvement un paroissien. Huguette Péron, Hélène Decaux et Danielle Delafosse, les trois religieuses retenues en otage par les assaillants, livrent dans le journal La Vie un témoignage glaçant de l’attaque.

"J'ai tout de suite compris". L’office n’est pas encore terminé quand un jeune homme se présente à elles. "Avec son polo bleu ciel, je l’ai pris pour un étudiant. Il voulait savoir quand l’église était ouverte. Je lui ai dit de repasser dans dix minutes, après la messe", relate sœur Huguette. Mais quand il revient, il est accompagné d’un autre homme, tous deux vêtus de noir. "Ils avaient le style des terroristes qu’on voit à la télé. L’un portait un calot noir sur la tête et la barbe bien fournie. J’ai tout de suite compris", raconte sœur Hélène, 83 ans. "Ils étaient très énervés, poursuit Huguette. Ils ont proféré une sorte de slogan en arabe puis nous ont reproché en français le fait que 'nous les chrétiens nous ne soutenions pas les arabes'."

"Le sourire doux" de l'un des terroristes. S’en suit une scène insoutenable, au cours de laquelle le père Jacques Hamel, 86 ans, est assassiné. Danielle parvient à s’échapper et à prévenir la police. Un autre paroissien présent avec sa femme, et à qui les deux assassins demandent de filmer leurs exactions, est lui grièvement blessé. Les deux assassins changent alors soudainement d’attitude. "J’ai eu le droit à un sourire du second. Pas un sourire de triomphe mais un sourire doux, celui de quelqu’un d’heureux", s’étonne encore Huguette.

" Vous direz à vos gouvernants que tant qu’il y aura des bombes sur la Syrie, nous continuerons les attentats. Et il y en aura tous les jours. "

"Quand vous arrêterez, nous arrêterons". Les tueurs s’adressent alors à sœur Hélène, et lui demandent si elle connaît le Coran. "Oui, je le respecte comme je respecte la Bible, j’ai déjà lu plusieurs sourates. Et ce qui m’a frappé en particulier, ce sont les passages sur la paix", répond-elle. "La paix, c’est ça qu’on veut", lui répond l’un des agresseurs. "Quand vous passerez à la télévision, vous direz à vos gouvernants que tant qu’il y aura des bombes sur la Syrie, nous continuerons les attentats. Et il y en aura tous les jours. Quand vous arrêterez, nous arrêterons", se souvient-t-elle dans les colonnes de l'hebdomadaire.

"Jésus ne peut pas être homme et Dieu. C’est vous qui avez tort", assène l’autre terroriste, Abdel Malik. P, à sœur Huguette. "Peut-être, mais tant pis", rétorque-elle. "Je ne voulais pas mettre de l’huile sur le feu et ne pas renier ce que je pensais, explique la religieuse. Pensant que j’allais mourir, intérieurement j’ai offert ma vie à Dieu.

Prenant les religieuses en otage pour sortir de l’église, les deux hommes sont finalement abattus par la police. Les sœurs, tout comme le couple de paroissiens présent, sortent saines et sauves, mais traumatisées. "Cela passera comme le reste", espère néanmoins sœur Hélène, avant de rappeler que "2016 est l’année de la miséricorde".