Simon a été victime d'une agression homophobe le 7 octobre dernier. Ce Lyonnais de 28 ans a été pris à partie par une bande de jeunes. Le manque de réactivité des forces de l'ordre a été pour lui une immense "déception". Il raconte à Olivier Delacroix, sur Europe 1, comment cet épisode traumatisant alimente désormais une inquiétude permanente, notamment chez ses parents.
"J'étais avec quelques amis, venus de Paris pour passer le week-end avec moi. En sortant d'un fast-food, place Bellecour, en plein centre de Lyon, on a été pris à partie par quatre jeunes garçons qui nous ont insultés. Tout d'abord, ça a été 'salut les filles'. Vu que l'on n'était que des garçons, on a vite compris le sens de leurs propos. Ensuite, on est passé directement à des 'sales PD', et puis assez rapidement à des coups. Avec un ami, on a été frappé.
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Les insultes sont extrêmement fréquentes, beaucoup trop fréquentes. Les coups, c'était la première fois.
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Appelée à la rescousse, la police refuse d'intervenir
Il y avait beaucoup de gens autour de nous, entre vingt et trente personnes qui se sont rassemblées au fur et à mesure de la scène, mais personne n'est intervenu. […] J'ai directement appelé la police. Ils ont refusé de se déplacer après l'agression. C'était une grosse déception sur le moment. Au début, on s'est dit que l'on n'allait pas porter plainte, que ça ne servait à rien.
Le lendemain, je me suis réveillé dans un état physique et psychologique catastrophique. Du coup, j'ai quand même décidé d'aller porter plainte. Au commissariat, c'était assez froid. La dame qui a recueilli la plainte a été plutôt gentille, même si elle a eu des paroles assez déplacées. Elle m'a conseillé, la prochaine fois, de me boucher les oreilles et de faire comme si je n'avais rien entendu… Sinon, elle a été sympathique. Est-ce qu'il est suffisant d'avoir un policier sympathique ? Je ne suis pas sûr. Il y a des choses à faire en plus, notamment en proposant un soutien psychologique. Ce n'est pas fait dans la plupart des cas, et c'est un vrai problème.
La DDSP lance une procédure interne
Une enquête a été ouverte à l'encontre de l'officier qui a refusé de se déplacer suite à l'appel de Simon. "La réponse du policier était inadaptée", a concédé la Direction départementale de la Sécurité publique (DDSP) du Rhône dans un communiqué publié le 11 octobre. "Nous avons engagé une procédure interne pour faire toute la lumière sur ce manquement", signale-t-elle.
Vivre avec la peur au ventre
Je ne mesurais pas l'inquiétude de mes parents, mais après l'agression, quand je les ai tenus au courant de ce qui s'était passé, j'ai réalisé qu'ils étaient inquiets au quotidien. Au téléphone, mon père a été choqué, ma mère a pleuré. Ils m'ont avoué qu'ils vivaient en permanence avec cette peur-là, parce qu'ils savent qu'à cause de notre sexualité, on est toujours en danger.
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Avec mon copain, dans la rue, on n'a jamais été complètement tranquille, mais là c'est une inquiétude supplémentaire. Les insultes font mal, mais on finit par avancer. Les coups inquiètent. En effet, il y a de la peur et de la colère parce que l'on voit que ces situations se multiplient. […] Je suis inquiet de ce qui va se passer dans les semaines à venir, avec l'ouverture des débats sur la PMA."
La parole se libère
SOS homophobie a enregistré entre janvier et septembre 2018 une augmentation de 35% des témoignages déposés sur sa ligne d'écoute. "Aujourd'hui, il y a des cas qui sont beaucoup plus médiatisés, avec des victimes qui prennent la parole et les dénoncent", commente au micro d'Europe 1 Jérémy Faledam, membre du bureau national de l'association.
"C'est un phénomène salutaire, qui met en lumière la permanence des LGBT-phobies. On espère que cela va mener à une prise de conscience sur les phénomènes qui existent aujourd'hui", ajoute-t-il.