"Si jamais nous voyons que ces deux jours de grève ne suffisent pas à désorganiser la production alors nous pourrons toujours durcir le ton". Un mail interne de la CGT-Cheminots, envoyé à ses militants, et révélé par Le Parisien, donne le ton de la mobilisation qui se prépare. Selon les premières estimations, de très nombreux trains devraient être annulés sur l'ensemble du territoire. L'objectif des syndicats est de faire revenir le gouvernement sur la réforme de la SNCF, tout en limitant l'impact financier pour les grévistes. Même si les précédentes mobilisations n'ont pas changé la donne. "Depuis 1995 sur le champ professionnel et 2006 sur le champ interprofessionnel avec la lutte contre le CPE, il faut bien admettre que nous avons pris quasiment que des fessées", estime un délégué de la CGT-Cheminots.
"Tenir bien plus longtemps". Pour le syndicaliste, "hormis une poignée d’agents, nous sommes incapables de tenir au-delà de 15 jours de grève et nous savons que face à un gouvernement déterminé comme celui que nous avons actuellement il nous faudra tenir bien plus longtemps". D'où l'avantage d'une "grève perlée", qui permet de "tenir trois mois tout en ayant quasiment le même impact qu'une grève reconductible classique". Le syndicaliste exprime sa satisfaction d'avoir pris de court Guillaume Pépy, le patron de la SNCF, et Elisabeth Borne, la ministre des Transports.
Perturber le trafic. La CGT prévoit également de perturber le trafic, même en dehors des jours de grève. "La désorganisation du travail devra se faire également sur les jours ouvrés mais je ne vous en dis pas plus sur ce mail, je pense que vous avez compris où l’on veut en venir", écrit ainsi le syndicaliste. Interrogé par Le Parisien, le délégué CGT assure qu'il ne s'agit en aucun cas "de préparer des actes de sabotages. Nous ne ferons qu’appliquer scrupuleusement le règlement. Par exemple, si le programme d’un conducteur prévoit un terminus à telle gare pas question d’aller au-delà si la direction le demande".
"Il n'y a jamais eu de mail interne". Après la parution du mail par Le Parisien, La CGT Cheminots a accusé mercredi la direction de la SNCF de "fouiller dans les poubelles de Facebook pour trouver des arguments visant à discréditer le mouvement des cheminots". "Il n'y a jamais eu de mail interne" du syndicat, a affirmé Cédric Robert, porte-parole de la CGT Cheminots. "C'est la preuve d'un manque de sérénité évident et d'une fébrilité sérieuse" de la direction, "ce n'est pas digne de dirigeants d'une entreprise publique", a-t-il ajouté, y voyant de "l'agitation orchestrée par celles et ceux qui craignent la mobilisation des cheminots". Alain Krakovitch, directeur général de SNCF Transilien, a lui affirmé que c'était "bien un mail". "J'ai été destinataire de ce mail il y a un peu plus d'une semaine", a-t-il précisé lors d'une conférence de presse.
La CGT Cheminots dément l'existence d'un mail interne https://t.co/4eg4pGS2hy
— CGT Cheminots (@cgtcheminots) 21 mars 2018
"Nous pouvons tenir trois mois". Le patron de la SNCF, Guillaume Pepy, a demandé mercredi matin sur RTL des explications au syndicat. "On organiserait la désorganisation ?". "Ça, Ce n'est pas la SNCF, ce n'est pas les cheminots, ce n'est pas le service public. (...) Rien ne justifie que pendant trois mois on prévoie une gêne permanente des usagers", a-t-il asséné. Dans le message, la CGT Cheminots estime que la grève en pointillés sera "IN-GÉ-RABLE" pour la direction et le gouvernement. "Nous pouvons tenir trois mois tout en ayant quasiment le même impact qu'une grève reconductible classique" et "la désorganisation du travail devra se faire également sur les jours ouvrés", selon le texte.
Élisabeth Borne critique "les méthodes". La ministre des Transports, Élisabeth Borne, a dit de son côté sur RMC qu'elle ne pouvait "pas croire que les cheminots adhèrent à ces méthodes", répétant que "la bonne démarche, c'est la négociation". Par ailleurs, concernant les prévisions de trafic à la SNCF jeudi, jour de mobilisation nationale des cheminots, la CGT accuse la direction de "dégrader volontairement les conditions de transport" sur "certaines lignes et certaines régions", alors que la manifestation "s'annonce importante" à Paris.
Les usagers et les cheminots bloqués Face à une manifestation nationale unitaire des cheminots qui s’annonce importante, direction SNCF et gouvernement s’enlisent dans des stratagèmes qui doivent être connus de tous. https://t.co/7t6xRNxRk5pic.twitter.com/XcuoeHCQO8
— CGT Cheminots (@cgtcheminots) 21 mars 2018
La direction "vise en priorité les trains dans lesquels les manifestants ont fait des réservations, mais elle bloque avec eux des milliers d'usagers", dénonce le syndicat, affirmant qu'"il est possible de faire autrement" et accusant la direction de "jeter de l'huile sur le feu". Il prend en exemple la décision de "laisser les trains à quai" sur "l'axe Lyon-Paris", alors qu'il y aura seulement "7 conducteurs de TGV déclarés grévistes sur 160", des "contrôleurs disponibles" et un "poste d'aiguillage tenu". "C'est totalement faux", le groupe "met tous les moyens pour maximiser le nombre de trains", a rétorqué devant la presse Mathias Vicherat, directeur général adjoint de la SNCF.