Ils ont souvent moins de dix ans et déjà des milliers, voire des millions d’abonnés. Sur YouTube, les chaînes mettant en vedette des enfants font florès, souvent pilotées en sous-mains par leurs parents. Né aux Etats-Unis, ce phénomène tend aussi à se répandre en France depuis plusieurs années. Ainsi Swan The Voice et ses 4,4 millions d’abonnés, son frère Neo qui en cumule 1,6, et presqu'autant pour Kalys et Athéna de la chaîne Studio Bubble Tea, suivie par 1,55 million de personnes.
Un dispositif inspiré de l'univers du spectacle ou des mannequins ?
Mais le cadre légal entourant les activités de ces enfants reste particulièrement flou, alerte le député LREM du Bas-Rhin Bruno Studer. Pour y remédier, cet élu a déposé une proposition de loi visant à mieux encadrer les influenceurs en culottes courtes. L’objectif étant de garantir les droits de l’enfance et de lutter contre toute forme de travail dissimulé. "Les enfants qui veulent faire de la photo, du cinéma et de la chanson sont protégés par des dispositions légales qui leur garantissent le droit de dire non, le droit aux loisirs, le droit au repos et le droit de bénéficier du fruit de leur travail le jour venu", rappelle Bruno Studer au micro de Matthieu Belliard, dans la matinale d’Europe 1.
"C’est dans ce cadre-là que l’on veut se placer", explique celui qui est également président de la Commission culturelle de l'Assemblée nationale. Il rappelle ainsi que pour faire travailler des enfants de moins de seize ans dans l’univers du spectacle, par exemple comme mannequin ou chanteur, des démarches administratives sont à faire auprès d’une commission départementale sous l’autorité du préfet. "Elle examine, avec des professionnels de la petite enfance, la demande d’autorisation formulée par les parents." Un dispositif que le député souhaiterait élargir aux enfants stars des plateformes comme Youtube ou Instagram.
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Détecter les formes d'exploitation
"Je veux être sûr que derrière il n’y a pas d’abus, de travail dissimulé et que les enfants sont consentants", explique Bruno Studer qui rappelle également que ces vidéos peuvent rapporter gros aux familles, à travers l’argent généré pas les publicités, et en partie reversé aux propriétaires de la chaîne par la plateforme, ou via des placements de produits à l’intérieur des vidéos.
Mais un enfant est-il en mesure de tenir tête à ses parents, quand bien même la loi se trouve de son côté ? Pour éviter une forme pernicieuse d'exploitation, permise par l'ascendant parental, le député propose notamment qu'une commission puisse examiner chaque cas selon une série de critères, parmi lesquels : la durée des vidéos, leur nombre, le montant des revenus qu’elles génèrent, mais aussi le nombre de vues. "Car on peut très bien imaginer que des parents, faute de succès, poussent leurs enfants à faire toujours plus de vidéos et leur mettent une pression incompatible avec ceux à quoi l’enfant a le droit", alerte Bruno Studer.
Reste également à obtenir la collaboration des plateformes. Car Bruno Studer souhaiterait que soit mis en place un droit à l’oubli, pour permettre à ces youtubeurs placés très jeunes sous les feux des projecteurs de faire supprimer les images les concernant s’ils le souhaitent un jour.