"C'est un chiffre énorme", selon Iris Maréchal, la présidente de l'Observatoire étudiant des violences sexuelles et sexistes dans l'enseignement supérieur. Vingt-sept suspicions de viols et douze agressions sexuelles ont été dénoncées à l'Université de Picardie Jules-Verne, à Amiens. Les faits ont été révélés entre mai et septembre 2020, à l'occasion d'une enquête sur la santé mentale des étudiants. Pour mettre fin à ce fléau, l'établissement vient de signer une convention en partenariat avec la police, le parquet d'Amiens et l'Association d'aide aux victimes France victimes 80.
Des violences sexuelles commises pendant des soirées
Les victimes présumées, âgées de 17 à 23 ans, n'auraient pas été agressées sexuellement dans les locaux de l'université, mais lors de soirées. "Il y a régulièrement les jeudis soirs, des soirées alcoolisées et nous constatons régulièrement des plaintes pour des agressions sexuelles et des soupçons de viol de personnes qui se sont retrouvées au mauvais endroit au mauvais moment, dans un mauvais état", indique le procureur de la République d'Amiens, Alexandre de Bosschere.
Même si "la seule cause des violences est l'agresseur", selon Iris Maréchal, ces situations sont malheureusement propices aux agressions. "Quatre principales causes sont remontées" durant l'enquête de l'association sur plus de 10.000 étudiants pendant un an et demi. "La première, c'est l'effet de groupe. Une pression qui pousse les étudiants à agir différemment pour être intégrés. La deuxième, c'est l'impunité pour les personnes ayant commis des violences car même si une victime témoigne auprès d'une école, il y a très rarement des conséquences derrière", explique la présidente de l'Observatoire étudiant des violences sexuelles et sexistes dans l'enseignement supérieur. "Troisième grande cause : l'alcool qui, selon les étudiantes et étudiants, conduit les gens à agir différemment. Enfin, la dernière cause, c'est vraiment le manque d'éducation et de sensibilisation sur le sujet."
"Il faut d'abord que la honte et la peur changent de camp"
La révélation de ces violences sexuelles au sein de l'Université de Picardie a été un "choc" pour Mohamed Ben Lahcen, le président de l'établissement d'enseignement supérieur. "On ne va pas faire les amateurs. Qu'il faut d'abord que la honte change de camp, que la peur change de camp et qu'ils sachent qu'il y a une prise en charge", affirme-t-il. C'est justement l'objet de la convention signée lundi. Désormais, au moindre signalement, la police d'Amiens ouvrira une enquête, assure David Preud'homme, directeur départemental de la Sécurité publique de la Somme. "Les personnes qui nous sont désignées seront entendues par les services de police", assure-t-il.
Pour Iris Maréchal, ces viols et agressions sexuelles présumées en Picardie sont finalement le reflet de ce qu'il se passe dans toute la France. "Ces violences sont présentes dans tous les établissements d'enseignement supérieur et généralisées sur différents cursus", explique-t-elle. Elle rappelle également qu'une étudiante sur dix déclare avoir été victime d'agression sexuelle pendant ses études et qu'une sur vingt dit avoir subi un viol.