Dans une vidéo devenue virale en quelques jours, avec plusieurs centaines de milliers de vues, des étudiants fraîchement diplômés de l’université Agro Paris Tech appellent à déserter les métiers auxquels ils ont été formés. Parmi leurs accusations : la destruction de l’environnement par le secteur agro-industriel. Bien que la nocivité de ce modèle agricole soit avérée, peut-on, de façon réaliste, envisager de s’en passer ?
Cela paraît utopiste, explique au micro d'Europe 1 l’agroéconomiste Nicolas Bricas : "Cela nous arrange d’acheter de l’huile, du sucre, de la farine et du pain, sans être obligé de tout faire nous-mêmes. C'est assez normal que ce secteur existe pour nous fournir ces choses-là", rappelle ce chercheur au Cirad. Sans compter que de nombreux aliments transformés peuvent difficilement être produits autrement.
Changer le système de l’intérieur sans le "déserter"
"Le problème, c'est que l’agro-industrie s’est structurée à un coût environnemental aujourd'hui insupportable pour nos sociétés. [...] Le système alimentaire représente un tiers des émissions de gaz à effet de serre. C'est un très grand responsable de l'effondrement de la biodiversité. Et c'est ça que dénoncent les étudiants d'Agro Paris Tech." Il faut donc changer de modèle, sans pour autant "déserter" cette industrie, comme le soulignent les étudiants d’Agro Paris Tech.
"On a besoin de cadres qui sont formés, et qui aillent travailler dans l'administration, dans les entreprises, qui feront bouger le système de l'intérieur", insiste Nicolas Bricas. "Mais ces jeunes sont exaspérés parce que le changement est trop lent, et c’est bien normal. On a besoin de militants comme eux, pour taper du poing sur la table."
Un système agroécologique couteux
Et de rappeler : "On pourrait nourrir 10 milliards d'habitants avec un système agroécologique, mais cela supposerait de réduire la surconsommation de produits animaux et d'accepter de payer notre alimentation plus chère qu'aujourd'hui, puisqu’elle doit intégrer les coûts environnementaux, sanitaires et sociaux dont elle est responsable aujourd'hui." Une question posée par de plus en plus de formations d’ingénieurs agronomes.