"Tout le monde lui demande ce qu'elle va nager comme courses et quel âge elle a." Evidemment, dans le contingent des nageurs professionnels, pour la plupart taillés comme des statues grecques, le physique d'Alzain Tareq surprend. Haute comme trois pommes, la représentante du Bahreïn est la plus jeune athlète présente aux championnats du monde de natation de Kazan : elle n'a que 10 ans et nagera vendredi matin les séries du 50 m papillon et samedi celles du 50 m nage libre.
Contrairement au Comité international olympique (CIO), qui ne permet pas à des athlètes âgés de moins de 15 ans de concourir, la Fédération internationale de natation n'a, elle, pas fixé de limite. Alzain, dont les records actuels sont évidemment bien loin de l'élite mondiale, a commencé à nager à l'âge de quatre ans et a très rapidement été plongée dans le bain des compétitions. "Nous avons commencé à prendre la route quand elle avait cinq ou six ans et elle s'entraîne deux fois par jour", révèle son père au site sport360.com. L'un de ses coachs, Khalifa Ali, est mort il y a six mois et c'est aussi pour lui rendre hommage qu'Alzain plongera dans la piscine de Kazan.
"Un contre-sens par rapport à l'événement." Même si l'histoire est belle, on peut évidemment se poser la question de l'intérêt de laisser une aussi jeune fille participer au plus grand rendez-vous nautique de l'année. "Même s'il y a toujours des contre-exemples de jeunes filles qui peuvent, grâce à une maturité biologique plus précoce, réaliser des performances très jeunes, je ne pense pas que ce soit possible ici", souligne au micro d'Europe 1 Richard Martinez, entraîneur national de la Fédération française.
Pour mémoire, Laure Manaudou a participé à ses premiers championnats du monde à l'âge de 16 ans et demi. Quant à l'Américaine Katie Ledecky, la nouvelle référence de la natation mondiale, elle avait décroché sa première médaille d'or lors d'une grande compétition internationale à 15 ans, aux JO de Londres. "Je pense que la présence de cette jeune fille du Bahreïn est un contre-sens par rapport à un tel événement. Ça doit répondre à mon avis à d'autres enjeux que des enjeux purement sportifs, certainement politiques", relève Richard Martinez.
Ces championnats du monde de Kazan marquent également la première participation de deux nageuses venues des Emirats arabes unis, âgées elles de 15 et 17 ans. Le plus jeune compétiteur chez les messieurs, Ahnt Khaung Htut, vient lui de Birmanie et n'a que 12 ans. Il a disputé dimanche les séries du 100 m brasse, signant le 74e temps des 76 engagés. "Dans la participation à une telle compétition, il y a aussi l'aspect émotionnel, affectif, et je ne suis pas sûr que ça construise tant que cela et si bien que cela", estime encore Richard Martinez. Loin de se projeter sur son avenir, Alzain semble elle profiter à plein de son séjour à Kazan. "Je suis très heureuse d'être ici", explique-t-elle. "Je suis un peu nerveuse mais c'est un sentiment exceptionnel d'être aux championnats du monde et de croiser tous ces grands athlètes. J'ai été très heureuse de rencontrer la Suédoise Sarah Sjöström." Sarah Sjöström, la championne d'Europe en titre du 50 m papillon, dont le record sur la distance est près de 17 secondes inférieur au sien (41"12 contre 24"43)...