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Droits TV, clash entre présidents, arbitres intimidés... Le football français pique sa crise

Romain Rouillard - Mis à jour le . 4 min
John Textor, président de l'Olympique lyonnais et Nasser Al-Khelaïfi, patron du Paris Saint-Germain
John Textor, président de l'Olympique lyonnais et Nasser Al-Khelaïfi, patron du Paris Saint-Germain © AFP

Englué dans une crise des droits TV qui a révélé de profondes tensions entre les dirigeants de club, le football français traverse une période de turbulences. Un climat délétère auquel se sont ajoutés les dérapages hallucinants de Pablo Longoria, président de l'OM et Paulo Fonseca, entraîneur de l'OL. Une table ronde est organisée ce lundi au siège de la FFF.

C'est une réunion qui arrive à point nommé tant les sujets à aborder son nombreux. Ce lundi, Philippe Diallo, président de la Fédération française de football, convie Vincent Labrune, son homologue de la Ligue de football professionnel (LFP), mais aussi plusieurs représentants de clubs de Ligue 1 et Ligue 2 dans un contexte de marasme économique lié à la crise des droits TV. Mais depuis une semaine, un autre caillou est venu se glisser dans la chaussure d'un football tricolore au bord de la crise de nerfs.

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Si, officiellement, le sujet n'était pas prévu au menu des discussions, il y a fort à parier que Philippe Diallo ne se privera pas pour remettre l'église au milieu du village et rappeler aux acteurs présents autour de la table leur devoir d'exemplarité. Ce dimanche, lors du succès de l'OL face à Brest (2-1), l'entraîneur lyonnais Paulo Fonseca a littéralement pété les plombs en venant coller son visage à celui de l'arbitre qui venait de l'expulser. Le tout en vociférant et en adoptant une attitude particulièrement menaçante, obligeant ses propres joueurs à le canaliser. "Je voulais m'excuser pour ce geste. Je ne devais pas faire comme ça", a ensuite déclaré le technicien portugais en conférence de presse. Mais le mal était fait.

"Corruption" et "championnat de merde" 

Et ce geste intervient surtout une semaine après un autre craquage : celui du patron de l'OM Pablo Longoria, au sortir d'une lourde défaite des Olympiens sur la pelouse d'Auxerre (3-0). Mécontent de la prestation de l'arbitre Jérémy Stinat, le président espagnol avait dénoncé une "corruption" et qualifié la Ligue 1 de "championnat de merde" avant d'écoper de 15 matches de suspension.

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Présent en tribune dimanche soir lors du succès marseillais aux dépens de Nantes (2-0), Longoria s'est tenu à carreaux, mais l'attitude outrancière de Fonseca a poussé le syndicat des arbitres à sortir du silence pour réclamer une sanction exemplaire à l'encontre de l'entraîneur lyonnais. "Il faut croire que monsieur Fonseca a été le seul acteur du foot pro cette semaine à ne pas avoir compris qu’il fallait respecter l’arbitre. C’est le seul qui n’ait pas entendu que la ministre s’est exprimée, le président de la FFF, de la LFP aussi. Il y a eu des sanctions à Marseille. On croit rêver !", a pesté le porte-parole Olivier Lamarre auprès de RMC Sport. Paulo Fonseca risque jusqu'à sept mois de suspension. 

Ce nouvel incident, symbole de la défiance entre les hommes en noir et les acteurs du jeu, traduit bien le climat délétère qui s'est installé dans les arcanes du football français. À l'image de cette crise des droits TV qui place dans le rouge les finances de nombreux clubs, particulièrement dépendants de ces recettes. Alors que la Ligue de football professionnel en espérait pour près d'1 milliard d'euros, c'est finalement pour 400 millions d'euros par saison, jusqu'en 2029, que DAZN s'est adjugé le lot de huit rencontres par journée. Mais confrontée à un nombre d'abonnés dérisoires en raison de tarifs jugés prohibitifs par de nombreux fans, la plateforme britannique avait menacé la LFP de ne pas honorer le paiement de la dernière échéance, soulignant des difficultés d'exploitation, en raison de l'explosion du piratage, et le manque de coopération de certains clubs pour mettre en valeur le "produit Ligue 1". 

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Deux clans qui s'affrontent

Un accord entre les deux parties a finalement été trouvé. DAZN a réglé son échéance - une somme de 35 millions d'euros - à la Ligue qui, en retour, a mis fin à la procédure judiciaire intentée contre le diffuseur. Une accalmie bienvenue dans un contexte de tensions extrêmes entre les différents présidents de clubs de Ligue 1, comme révélé par L'Équipe. Le quotidien s'est procuré les échanges saisissants entre les patrons de club lors de la réunion du 14 juillet censée acter le choix du diffuseur de la Ligue 1 pour les cinq prochaines saisons.

"Nasser, tu es un tyran !", lançait alors John Textor, président de l'OL, à Nasser Al-Khelaïfi, patron du PSG qui répondait à l'Américain en le traitant de "cow-boy". Une passe d'armes regrettable pour l'image du football français et qui met en lumière deux clans qui s'affrontent. Le premier, mené par Nasser Al-Khelaïfi, soutenu par plusieurs présidents de Ligue 1 - dont ceux de Reims et de Montpellier - et le second emmené par John Textor, qui reproche au dirigeant du PSG une mainmise sur les instances du football français et une influence trop importante en coulisse. Au cœur des griefs, la double casquette de Nasser Al-Khelaïfi, à la fois patron du PSG et à la tête de BeIN Sports, qui participe régulièrement aux appels d'offres pour les droits TV. Certains y voient un risque de conflit d'intérêts. 

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En réponse à Nasser Al-Khelaïfi, John Textor était arrivé au Groupama Stadium de Lyon avec un chapeau de cow-boy lors de la rencontre OL-PSG le 23 février dernier.
En réponse à Nasser Al-Khelaïfi, John Textor était arrivé au Groupama Stadium de Lyon avec un chapeau de cow-boy lors de la rencontre OL-PSG le 23 février dernier. © Olivier CHASSIGNOLE / AFP

Autant dire que la réunion de ce lundi autour de Philippe Diallo revêt une importance capitale. "La situation n'est pas bonne pour la crédibilité de notre football. En Ligue 1 et Ligue 2 nous avons des clubs en grande difficulté, mon rôle est d'essayer d'éviter des défaillances (...) On n'est pas à l'abri que des clubs s'arrêtent à la fin de la saison, peut-être avant", avertissait ce dernier le 13 février dernier. D'où la nécessité, selon lui, de profiter de l'occasion pour "élargir le spectre au-delà du litige avec DAZN" et de mener "une réflexion plus profonde sur le modèle économique et la gouvernance du football professionnel".