Président de la Fédération Française de Football depuis 2011, Noël le Graët a accordé une interview exclusive à Europe 1. À quelques jours du début de l’Euro de football féminin en Angleterre et à cinq mois de la Coupe du Monde au Qatar, le dirigeant de 80 ans évoque l’équipe de France féminine et sa sélectionneuse Corinne Diacre, mais aussi l’équipe masculine, ses contres performances lors de la Ligue des Nations et l’avenir du sélectionneur Didier Deschamps, qui devrait se sceller après le mondial en fin d’année.
Sur le statut de l'équipe de France féminine avant le début de l'Euro (le 6 juillet) : "On est dans les meilleures"
"Elle est parmi les meilleures équipes du monde. Si on prend le classement mondial, les États-Unis sont en tête, mais elles ne font pas le championnat d'Europe. La Suède doit être deuxième et la France troisième, donc on est dans les meilleures. Avec l'équipe actuelle, si on ne gagne pas cette année, ce sera plus difficile encore dans l'avenir. On vient de faire quatorze matchs sans défaite et l'équipe joue de mieux en mieux. Il y a une cohérence dans le groupe. Il y a une estime pour la coach et très franchement, ça se passe bien."
Sur le développement du football féminin : "Des résultats cohérents"
"J'ai eu la chance d'assister à l'un des premiers matchs quand j'ai été élu, en Allemagne. Je m'étais aperçue que notre équipe avait un peu de retard dans les équipements. On n'était peut-être pas aussi bien traité que les autres. En retour, on a modifié les choses et l'équipe féminine, aujourd'hui, a un bon standing et des résultats cohérents depuis déjà plusieurs mois. On a aujourd'hui des licenciés qui sont devenus importants, on est au-dessus des chiffres d'avant Covid. On doit être à 210.000 il me semble, donc il y a effectivement un impact relativement fort au niveau des licences. À chaque fois qu'un club, petit ou moyen, créer une équipe de foot, il y a 50 licenciées de plus."
Sur son soutien à Corinne Diacre : "Si on change tout le temps, on ne progresse pas"
"Je crois que si on change tout le temps, on ne progresse pas. Corinne a beaucoup progressé avec ses joueuses. Aujourd'hui, ses joueuses l'estiment. Il n'y a pas de conflit, il y aura toujours des mots, mais il n'y a pas de souci majeur. Elle a trouvé le ton qui convient. Elle a trouvé aussi la formation qui convient et quand je vois ses derniers matchs, je vous assure qu'il y a de très belles actions."
Sur la responsabilité de la FFF lors des incidents survenus au Stade de France le 28 mai dernier : "On ne sait pas encore la vérité"
"J'ai laissé les cinq personnes responsables de la sécurité s'exprimer. S'il y avait eu des difficultés, j'aurais été présent. Mais on avait quand même l'habitude d'organiser des rencontres de 80.000 personnes depuis 15 ans et il n'y a jamais eu d'incidents, même pendant les attentats. Je crois qu'on a su gérer une période qui est encore plus compliquée que celle-là. On ne sait pas encore la vérité, l'extérieur, la billetterie, tout ça, c'est toujours en cours. Quand vous avez la chance de recevoir de belles équipes comme le Real Madrid et Liverpool et qu'on ne retient le lendemain que les bagarres aux entrées, c'est dommage."
La Coupe du monde tous les deux ans : "C’est terminé"
"Gianni (Infantino, président de la FIFA) je le vois régulièrement. Je crois que c'est terminé. Moi, je resterai partisan de cela, mais pour les filles parce qu'elles n'ont pas assez de matchs de haut niveau. Les continents ont besoin que ces équipes nationales tournent. Pour les garçons, surtout en Europe, il y a déjà trop de matchs. Mais il y a des continents qui n'ont pas de match, qui auraient voté oui.. Plein de continents n'ont pas la qualité de l'Europe, ni l'argent de l'Europe. L'Europe a fait beaucoup d'efforts sur les clubs, plus que sur les sélections nationales. Je déplore ça. Je préfère effectivement que lorsqu'on discute de l'avenir du football, les équipes nationales soient mieux considérées."
Sur les mauvais matchs de l'équipe de France masculine : "Les matchs qui viennent seront très importants"
Je crois que les matchs qui vont être importants, ce sont ceux de septembre parce qu'il y aura eu les congés, les effectifs vont être en place dans tous les clubs et Didier aura son effectif sur pied sur les deux matchs de fin septembre et il n'y en a pas d'autres. Il n'y a pas d'autres matchs avant la Coupe du monde. Ça vient vite et donc les deux matchs qui viennent seront très importants. Je pense que l'équipe au complet, elle est très forte. Je n'ai pas pu bien regarder les classements, mais on doit être encore troisième mondial, malgré les défaites et les nuls. Le Brésil est devant nous, la Belgique aussi. Quand on est au complet, on est très dur à battre.
Sur l'avenir de Didier Deschamps : Si on gagne, pourquoi voulez-vous changer ?
Au mois de juillet, on va passer une journée ensemble à Guingamp et on va discuter de tout et de rien pour bien préparer la Coupe du monde et après la Coupe du monde, qui sait ? Si on la gagne, pourquoi voulez-vous changer ? Si on fait une très mauvaise Coupe du monde, il y aura beaucoup de changements. C'est quelqu'un que j'aime beaucoup et je pense qu'il me le rend bien. On fait la Coupe du monde et on discute après. Tout est décidé. Avec lui, on n'a pas mis une pièce en l'air. Ça va faire dix ans qu'on travaille ensemble. C'est un homme pour qui j'ai une considération extrême. Mais la Coupe du monde, c'est une valeur momentanée et donc tu ne peux pas négliger les résultats d'une compétition comme celle-là. S'il arrive dans les quatres derniers, il aura quelques chances de rester.
Sur les tensions avec Kylian Mbappe sur la question des droits à l'image : Ça s’est très bien passé
Ça s'est nettement arrangé puisque je l'ai vu seul. Je l'ai vu ensuite avec les autres joueurs. Donc, je l'ai vu à Clairefontaine avec les cadres et ensuite j'ai vu les 25 joueurs en leur posant les questions que vous posez. Ça, c'est extrêmement bien passé.