"Cette question (de la candidature de Michel Platini), n'est pas pour le comité d'éthique mais pour la commission électorale de la Fifa, qui sera chargée d'en étudier la validité." C'est par ces mots que la commission d'éthique de la Fifa, qui a annoncé jeudi une suspension de 90 jours pour Michel Platini, a répondu à la seule question que tout le monde se pose, jeudi soir : Michel Platini pourra-t-il être candidat à la présidence de la Fifa, dont l'élection aura lieu le 26 février prochain ? Europe 1 a interrogé Jean-Jacques Bertrand, avocat en droit du sport et spécialiste de la Fifa.
Une candidature déposée à temps, recevable en l'état. Michel Platini l'a annoncé quelques minutes seulement avant que sa suspension de 90 jours ne devienne officielle : il a effectué les démarches nécessaires pour "déposer" sa candidature à la présidence de la Fifa. "Sa candidature a été notifiée avant que la suspension ne soit prononcée, donc sur la plan de la recevabilité, la candidature semble bonne", souligne Jean-Jacques Bertrand. "Il faut également qu'au moment de l'élection, Michel Platini soit toujours éligible et donc, pas sous le coup d'une suspension. Il a été suspendu jeudi à titre conservatoire pendant 90 jours. La sanction ne couvre donc pas la date du 26 février 2016. Donc, pour le moment, il reste éligible."
La commission électorale aura le dernier mot. Pour être éligible, Michel Platini doit l'être également, et surtout, pour la commission électorale. "Il y a une instruction qui précède cette décision. Et celle-ci est effectuée par la chambre d'instruction qui a rendu la recommandation pour le comité d'éthique", relève Jean-Jacques Bertrand. Peut-être un mauvais signe pour Michel Platini. "On ignore cependant la recommandation qui a été donnée par la chambre d'instruction pour la commission d'éthique et on ignore l'avis qui peut être demandé par la commission électorale", détaille Jean-Jacques Bertrand. Pour ce spécialiste en droit du sport, il faudrait aujourd'hui connaître précisément ce qui est reproché à Michel Platini. Mais lui seul le sait.
Platini va faire appel. Une chose est sûre : le dirigeant français, qui a reçu le soutien du comité exécutif de l'UEFA et qui va faire appel devant la commission de recours de la Fifa, ne considère pas ce motif comme suffisamment fort pour jeter l'éponge. Blatter est accusé par la justice suisse d'avoir "signé un contrat défavorable" à la Fifa avec l'Union caribéenne de football. Il lui est également reproché un versement en 2011 de deux millions de francs suisses (1,8 millions d'euros) à Platini, président de l'UEFA, qui doit lui répondre essentiellement du timing de ce paiement. Sa volte-face quant à son vote pour l'attribution de la Coupe du monde 2022 au Qatar et son rendez-vous avec Nicolas Sarkozy pourraient également jouer contre lui.
Sepp Blatter, "l'arroseur arrosé"... Cette suspension de 90 jours de toutes fonctions dans le football ne pèse évidemment pas du même poids pour Sepp Blatter, en fin de carrière et démissionnaire, que pour Michel Platini, candidat à sa succession. "Trois mois pour monsieur Blatter et trois mois pour monsieur Platini, la proportionnalité mérite d'être regardée", souligne Jean-Jacques Bertrand. "Cette commission d'éthique, c'est une structure née de la volonté de la Fifa et de monsieur Blatter en particulier. C'est un peu l'arroseur arrosé." Vraiment ? Certains observateurs, comme Raymond Domenech, pensent que l'arroseur a également voulu jeter un peu d'eau sur ceux qui sont devenus des ennemis au fil des ans, comme Michel Platini...