Après un été particulièrement chargé sur le plan judiciaire, Sepp Blatter s’est confié dimanche au micro d’Europe 1. Le Suisse, qui a dirigé la FIFA entre 1998 et 2015, a entamé le 30 juillet une série de trois auditions dans le cadre de la procédure pénale ouverte contre lui en septembre 2015, pour "soupçon de gestion déloyale et abus de confiance". Il sera de nouveau interrogé mardi. Au cœur de ce gigantesque scandale de corruption : le paiement présumé déloyal de deux millions de francs suisses fait en 2011 à Michel Platini, alors président de l’UEFA. Europe 1 vous résume les principales déclarations de l'ancien patron du football mondial.
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Sur le paiement fait à Michel Platini
"C’est un paiement d‘arriéré de salaire", a une nouvelle fois clamé Sepp Blatter. La justice suisse soupçonne elle un "paiement déloyal de 2 millions de francs en faveur de Michel Platini, président de l’Union des associations européennes de football (UEFA), au préjudice de la FIFA, prétendument pour des travaux effectués entre janvier 1999 et juin 2002". Le paiement a été effectué en février 2011 et aurait eu pour but de faire pencher la balance quant à l’attribution de la Coupe du monde 2022.
Sur ses liens avec Michel Platini
"Cela fait un moment que je n’ai plus du tout de de lien avec Michel Platini. Je ne sais pas exactement pourquoi. Je l’ai eu au téléphone il y a peu de temps, mais il a simplement dit qu’il faisait confiance à la justice suisse", a confié l’ancien dirigeant. "Si je l’avais en face de moi aujourd’hui, je le prendrais dans mes bras, malgré les restrictions dues au coronavirus. Je lui dirais : 'bravo Michel, maintenant on se retrouve au tribunal et on est ensemble. N’oublie pas qu’en 2007, on était encore plus ensemble, quand je t’ai donné un petit pas pour la présidence de l’UEFA'".
Sepp Blatter a également confié que les deux hommes se croiseraient lundi, au tribunal. Mais depuis 2015, leurs relations sont rompues. Michel Platini a longtemps estimé que Sepp Blatter était à l’origine de la "cabale" contre lui. "Je n’ai pas compris", a déploré le Suisse.
Sur un "complot anti-Platini"
Pour Sepp Blatter, le "Fifagate" est un complot. "La cible numéro 1 du complot, c’était Michel Platini, pas moi", affirme-t-il. "Celui qui pouvait être dangereux pour le président actuel, qui était à l'UEFA (Gianni Infantino), n'était pas moi, car j'avais mis mon mandat à disposition". "Il fallait arrêter celui qui avait vraiment des chances de devenir" le prochain président de l'UEFA, continue Sepp Blatter.
Gianni Infantino aurait-il alors comploté à des fins personnelles pour devenir président de la FIFA ? "Je ne peux pas assurer cela, car il n’y a pas de preuves. Mais quand on met tous les pions ensemble…. Il y a eu une fuite, une dénonciation", a insisté l’ancien dirigeant.
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Sur une éventuelle condamnation
"Je n’ai peur de rien", a martelé l’ancien dirigeant. "Je ne vois pas pourquoi j’irais en prison. Moi pour le moment, je pense à profiter de la vie et à m'occuper un peu encore du football."
Sur la gestion de la FIFA de la crise sanitaire
Au micro d’Europe 1, Sepp Blatter a aussi longuement regretté le manque d’action de la FIFA pendant la crise provoquée par le Covid-19, qui a engendré la suspension de nombreuses compétitions et des matches disputés à huis clos. "J’ai des frissons quand je pense à ce qu’on aurait pu faire. On aurait pu lancer un message et on ne l’a pas fait. De l’argent a été mis à disposition, mais ce n’est pas ça qu’il fallait ! Il fallait des relations humaines. Le football aurait pu faire quelque chose". Si de nombreux joueurs ont pris des initiatives, Sepp Blatter estime que les instituions du football n’ont pas été à la hauteur. "C’est bien beau de faire des minutes de silence, mais on a perdu une occasion formidable de montrer que le football peut jouer un rôle social".
Sur l’attribution de la Coupe du monde 2022 au Qatar
"Moi je ne voulais pas aller au Qatar. Il y avait un consensus au comité exécutif de la FIFA, pour qu’en 2018, on aille en Russie et puis aux Etats-Unis en 2022. Mais c’est tombé à l’eau. Maintenant, s’il faut aller au Qatar, on ira au Qatar", a-t-il déclaré. Le Mondial doit bel et bien avoir lieu dans le pays du Golfe en novembre et décembre 2022.
Sur le Final 8 de la Ligue des champions et le PSG
Interrogé sur le résultat de la finale de la Ligue des champions, remportée par le Bayern Munich face au PSG (2-0), Sepp Blatter a estimé que le club parisien avait tendance à s'appuyer "sur ses deux grandes vedettes" (Mbappé et Neymar). "Mais cette fois-ci, ses deux grandes vedettes… Ce n’était pas nécessairement ce que l’on attendait, surtout de la part de Neymar", a-t-il analysé. "Juste avant la mi-temps, Mbappé sur son pied droit... Ce ballon à dix mètres, on le met dans les filets ! Moi, je l'aurais mis dans les filets !", a également avancé l’homme de 84 ans.
"Bien sûr que le PSG peut aller plus loin" dans les années à venir, estime-t-il toutefois. "Le club a les moyens économiques et a une grande qualité de joueurs mais il ne faut pas accès son jeu sur seulement deux joueurs".
Sur la VAR
"La VAR ne résout pas les problèmes d’arbitrage. […] A l’origine, nous voulions, comme au volley ou au tennis par exemple, que les entraîneurs puissent, deux fois par mi-temps, consulter la vidéo. Je pense que ça aurait été une solution possible", a expliqué l’ancien dirigeant à propos de l'arbitrage vidéo, toujours très controversé et auquel Michel Platini était, lui, farouchement opposé. "On ne peut pas installer un système révolutionnaire à une Coupe du monde sans avoir fait avant de sérieuses expériences", a regretté Sepp Blatter à propos du Mondial 2018.
Sur son rêve de prix Nobel de la paix
Sepp Blatter a également confié dimanche soir avoir rêvé du prix Nobel de la paix, pour lui ou pour la FIFA. "Ça m’aurait fait très plaisir", a-t-il appuyé. Il est à l’origine de l’attribution de la Coupe du monde 2010 à l’Afrique-du-Sud, premier Mondial de football organisé sur le continent africain, et assure avoir souhaité organiser successivement les Coupes du monde 2018 et 2022, en Russie puis aux Etats-Unis, pour rapprocher les deux grandes puissances.