Sans Cristiano Ronaldo, sans Andrés Iniesta, sans Zinédine Zidane, le Championnat d'Espagne a repris vendredi soir, après un été mouvementé qui a rebattu les cartes entre le tenant Barcelone, le Real Madrid en chantier et un Atlético à l'ambition grandissante. Sans "CR7" face à Messi, les clasicos Barça-Real n'auront plus la même saveur. Et c'est une page dorée qui se tourne pour la Liga, plus moderne avec l'introduction de l'assistance vidéo à l'arbitrage (VAR) et plus ouverte que jamais. Derrière les deux ogres, l’Atlético de Madrid rêve de bouleverser la hiérarchie. Troisièmes en 2017, deuxièmes l’an dernier - à distance respectable de Barcelone -, les Colchoneros semblent cette fois suffisamment armés pour lutter pour le titre. Passage en revue des forces en présence.
Au Real, la vie sans Zidane et Ronaldo
Été compliqué pour les Merengue qui ont commencé par perdre leur entraîneur, Zinedine Zidane, fin mai. Le Français, qui a triomphé au Real Madrid avec notamment trois Ligues des champions consécutives et une Liga, avait besoin de passer à autre chose, pour son propre bien mais aussi celui de l’équipe, afin de ne pas s’enfermer dans une routine. Un coup dur pour les joueurs qui étaient très proches de Zizou. A la place, ils ont récupéré Julen Lopetegui dans des circonstances désagréables : le sélectionneur espagnol a été débarqué de son poste avant le début de la Coupe du monde pour s’être déjà engagé avec la "Maison Blanche".
Recrutement timide. Les Merengue n’étaient pas au bout de leur surprise, puisque le 10 juillet, Cristiano Ronaldo a lui aussi quitté le club, direction l’Italie et la Juventus Turin. Le Portugais, maître à jouer du Real Madrid depuis 2009, meilleur buteur de l’histoire du club et qui a tout gagné là-bas, est parti contre un chèque de 100 millions d’euros. "La perte d'un joueur aussi déséquilibrant et aussi important pour le Real est toujours négative", a reconnu mardi le capitaine Sergio Ramos. L’enveloppe substantielle aurait pu permettre au club de se renforcer. Mais le seul apport de poids à l’effectif est le recrutement du gardien belge Thibaut Courtois, pour environ 35 millions d’euros, à un poste où le Real Madrid était déjà bien pourvu avec Keylor Navas.
Au cœur du jeu, le Real Madrid s’est contenté de seconds couteaux et de jeunes espoirs (l’ailier brésilien Vicinius et le latéral espagnol Odriozola). En attendant peut-être un dernier coup de collier en fin de mercato, les clés de la "Maison Blanche" sont donc entre les mains des "anciens". Julen Lopetegui a dit compter sur une répartition plus équilibrée de la menace offensive entre Gareth Bale, Karim Benzema ou Marco Asensio pour apporter une réponse collective au départ de Ronaldo. D'ailleurs, Bale et Benzema ont signé une bonne première période contre l’Atlético lors de la Supercoupe d’Europe (défaite 4-2), avec un but du Français sur un centre du Gallois, lequel peut enfin prendre les commandes du jeu merengue si les blessures l'épargnent.
Sans Iniesta, le Barça compte sur Messi
Côté Barcelonais, le club catalan a gardé l'ossature de l'équipe auteure du doublé Liga-Coupe l'an dernier, dont le Français champion du monde Samuel Umtiti, et avec l'entraîneur Ernesto Valverde, qui débute sa deuxième saison. Sont arrivés des joueurs de complément comme Malcom, Clément Lenglet ou Arturo Vidal. Si les deux premiers n’ont pas vocation à être titulaires dans l’immédiat, le Chilien (31 ans) a la lourde tâche de remplacer Andrés Iniesta. Véritable cerveau du Barça triomphant de la décennie écoulée, "Don Andrés" a plié bagage pour terminer sa carrière au Japon, laissant derrière lui un grand vide. "Le grand Andrés va beaucoup nous manquer cette année", a résumé mercredi Lionel Messi, qui a hérité du brassard.
A 31 ans, après une Coupe du monde encore décevante (élimination en huitièmes), l'Argentin semble avoir reporté tous ses espoirs sur son club alors que la presse rapporte qu'il compte prendre une respiration vis-à-vis de sa sélection. Et Messi a annoncé ses ambitions : il rumine encore l'élimination en quarts de C1 contre l'AS Rome (4-1, 0-3) et espère reconquérir le titre européen au printemps prochain. "Cette année, je crois que nous avons un effectif qui nous permet de rêver. Les recrues vont nous aider à être meilleurs qu'avant", a prévenu "La Pulga". "Nous allons faire tout notre possible pour que cette coupe si belle et si désirée revienne à nouveau au Camp Nou." Pour y arriver, il pourra notamment compter sur l'aide d'Ousmane Dembélé, revanchard après sa Coupe du monde passée sur le banc.
Griezmann pour guider l’Atlético
Derrière un Real sans repères et un Barça plutôt discret pour l’instant, l’Atlético de Madrid peut espérer rejouer le coup de la saison 2013-14. A la surprise générale, les Colchoneros avaient décroché le titre en Liga au terme d’une saison à suspense. Ils ne sont plus nombreux à avoir vécu cette épopée (la charnière uruguayenne Godin-Gimenez, Juanfran Koke et Diego Costa, qui est passé par Chelsea entretemps). Mais l’effectif 2018 des hommes de Diego Simeone semble encore plus fort, toujours articulé autour d’Antoine Griezmann et de la plupart des vainqueurs de la Ligue Europa 2018. Auréolé de son titre de champion du monde, le Français, qui a décidé début juin de rester à Madrid après avoir été au centre de rumeurs de transferts, débute cette nouvelle saison en pleine confiance.
Des recrues très offensives. Griezmann pourrait évoluer sur un côté gauche 100% tricolore puisqu’en plus de Lucas Hernandez, un troisième champion du monde français a débarqué à l’Atlético à l’intersaison, en la personne de Thomas Lemar. Recruté à l’AS Monaco pour 70 millions d’euros, le jeune milieu porte sur ses épaules la pression du joueur le plus cher de l’histoire du club. Remplaçant peu utilisé au Mondial (un match), Thomas Lemar devra s’adapter aux méthodes musclées de Diego Simeone. Tout comme l'attaquant croate Nikola Kalinic ou l'ailier portugais Gelson Martins, autres recrues de choix des Colchoneros. Pour que l’Atlético puisse envisager de se mêler à la lutte pour le titre, il faut au minimum que la sauce Simeone, mélange de préparation physique intense et de rigueur extrême sur le terrain, prenne à nouveau.
La victoire contre le rival madrilène lors de la Supercoupe d’Europe a donné une idée du potentiel des Colchoneros. Malgré un Griezmann en demi-teinte, la faute à une préparation tronquée, les coéquipiers du capitaine Diego Godin ont dominé, après prolongation, des Merengue au complet. Auteur d’un doublé, Diego Costa a pris rendez-vous, tandis que Saul et Koke (un but chacun) ont répondu présent après leur Coupe du monde ratée. Thomas Lemar, titulaire à droite pour son premier match officiel sous ses nouvelles couleurs, a effectué un match plein. Encourageant donc, avant d’entamer une saison qui s’annonce longue, entre le championnat et la Ligue des champions. Pour espérer briller sur les deux tableaux, l’Atlético de Madrid devra se montrer plus régulier que par le passé. Dans cette optique, un grand "Grizi", prétendant au Ballon d’Or, serait un plus…