Espionnage, écoutes, analyses... Qu'est-ce que «Luch/Olymp-2», ce satellite russe qui interroge par ses manœuvres ?

Lancé dans l'espace en mars 2023, le satellite russe Luch/Olymp K2 suscite des interrogations en raison de ses manœuvres à plus de 36.000 km au-dessus de nos têtes. Depuis son lancement, cet engin est soupçonné d'avoir espionné plusieurs satellites de communication, notamment français.
C'est un satellite qui fait froncer quelques sourcils. Lancé par la Russie en mars 2023 à bord d'une fusée Proton-M, le satellite Luch/Olymp K2 a rapidement attiré l'attention de plusieurs puissances spatiales, dont la France, par son comportement à proximité d'autres satellites à plusieurs dizaines de milliers de kilomètres au-dessus de nos têtes.
Des satellites commandés par... le FSB
Lors de son lancement en 2023, la Russie a présenté l'engin, officiellement sous le nom de Luch-5X, comme un satellite relais géostationnaire. Mais en réalité, il serait le "deuxième d'une famille de satellites qui effectue des missions de renseignement et de surveillance de l'environnement spatial par la Russie", selon Norbert Pouzin, analyste orbital chez Aldoria.
Ce satellite orbite donc à "36.000 km au-dessus de la Terre et a pour particularité de tourner à la même vitesse que la Terre". Cela permet au satellite de rester fixe au-dessus d'un point défini sur la planète. De plus, ces engins spatiaux ne sont pas "des satellites qui ont été commandés par l'Agence spatiale russe, ni par le ministère de la Défense. Ils appartiennent au FSB", précise Norbert Pouzin.
Un satellite espion capable "d'écouter" les signaux transmis
Rapidement après son envoi dans l'espace, le satellite russe se serait placé à proximité de trois satellites de télécommunications d'Eutelsat. Plusieurs mois après, Olymp K2 change de cible et se place à proximité, "traditionnellement entre 50 et 100km à côté" d'un satellite de communication Astra, en juin 2024. Et selon le site Sat Track Cam, le satellite russe est à proximité du satellite Intelsat 39 depuis le 7 mars dernier.
Ce satellite peut représenter plusieurs menaces, le premier d'entre eux étant celui d'une collision : "À 100km, il n'y a pas trop de risques. Mais Luch-Olymp s'est rapproché plusieurs fois à moins d'un kilomètre d'autres satellites, donc là, on a vraiment un risque de collision en orbite qui est élevé", explique Norbert Pouzin.
Cette proximité avec des satellites étrangers laisse à penser que le satellite Luch/Olymp K2 serait un engin espion qui va "analyser les signaux émis ou transmis par le satellite ou reçus par un satellite avec sa station-sol". "On ne sait pas s'il a la capacité de décrypter les signaux, néanmoins, il a la capacité d'écouter le signal et le transmettre à sa station-sol en Russie pour des analyses", décrypte Norbert Pouzin.
Une pratique qui ne serait pas unique aux Russes
Des observations et des interceptions de signaux qui pourraient aider la Russie à développer son système Tobol, capable de brouiller ou de désactiver les communications des satellites positionnés en orbite géostationnaire, comme l'explique le journal La Nouvelle Tribune ainsi que Look Up Space. Une "arme" qui pourrait être d'une grande importance dans un conflit armé.
Ce n'est pas la première fois que la Russie est accusée d'espionnage à travers l'utilisation de satellite. Luch/Olymp K, lancé en 2014, avait effectué des manœuvres similaires autour du satellite de communication militaire franco-italien Athena-Fidus en 2017. Une situation qu'avait dénoncée la ministre des Armées de l'époque, Florence Parly.
Cependant, la Russie ne serait pas le seul pays à avoir recours à ce genre d'engins dans l'espace, comme l'explique Norbert Pouzin : "Les Chinois développent cette capacité, on se doute bien que les Américains le font depuis longtemps, mais ces informations sont cachées. Les Russes n'ont pas attendu la guerre avec l'Ukraine pour se lancer là-dedans".