Fusée Spectrum : quel est ce nouveau lanceur allemand qui va relancer l’Europe dans la course à l’espace ?

Initialement prévu pour lundi 25 mars, le vol de la fusée allemande Spectrum a été reporté au jeudi 27 mars, du fait de mauvaises conditions météorologiques. Son envol constitue le premier lancement orbital commercial d’une société européenne privée, en Europe continentale. Mais quelles sont les missions de Spectrum et comment renforce-t-elle l’indépendance de l’Europe dans le domaine spatial ?
Plus besoin de quitter le Vieux continent pour lancer des fusées européennes, tel est l’objectif principal que Spectrum doit accomplir ce jeudi 27 mars. Il s'agira du premier lancement orbital commercial d’une société européenne privée, en Europe continentale. Comment ce vol renforce-t-il l'indépendance européenne dans le domaine spatial et quelles sont les missions de la fusée allemande Spectrum ?
Plus petite mais tout aussi puissante
"Avec une conception axée sur la flexibilité et la réduction des coûts, Spectrum représente une étape potentielle vers un accès indépendant et compétitif à l’espace pour l’Europe", peut-on lire sur le site de la Cité de l’Espace de Toulouse.
Haute de "seulement" 28 mètres, constituée de deux étages et développée par l’entreprise allemande Isar Aerospace, Spectrum ne pèse que 30 tonnes. Pour comparaison, la fusée Ariane 6 de l'ESA, approche les 860 tonnes.
Malgré son petit gabarit, le lanceur peut déployer une charge utile (des satellites miniatures) d’une tonne en orbite terrestre basse, ou 700 kg sur une orbite héliosynchrone, une orbite terrestre située près d’un pôle au sens de rotation anti-horaire.
Autre détail exclusif, Spectrum utilise une combinaison de carburant RP-1 (une forme raffinée de kérosène) et d’oxygène liquide (LOX), pouvant être stocké à une température extrêmement basse (– 183 °C), et est dotée d’un système de réchauffement de ses équipements sensibles.
Un premier vol aux multiples enjeux
Une révolution qui permet de la faire décoller depuis l’Europe continentale, de la base de lancement d’Andøya en Norvège plus précisément. Située au-delà du cercle polaire, cette base donne un accès plus simple à une orbite héliosynchrone, et d’assurer aux satellites et fusées d’être toujours orientés face au Soleil.
La base d’Andøya lançait jusqu’alors uniquement des fusées suborbitales, et inaugurera donc le premier tir vertical d'un véhicule orbital sur le continent européen.
Plus besoin d’aller à Kourou, en Guyane française, pour ce type de lancement. Une première en Europe, que les agences espèrent pérenniser si le vol du 27 mars est une réussite.
"Nous ne nous attendons pas à atteindre l'orbite avec ce test. En réalité, aucune entreprise n'a encore réussi à placer son tout premier lanceur orbital en orbite. SpaceX a eu besoin de quatre tentatives, mais nous voulons aller plus vite", a confié Daniel Metzler, cofondateur et patron d'Isar Aerospace, auprès de l’AFP.
De nouvelles bases de lancement pour conserver la souveraineté de l’Europe
Suède, Portugal ou encore Écosse, de nombreux pays voisins construisent de nouveaux "ports spatiaux", afin de mettre en orbites les satellites, envoyés grâce aux lanceurs des sociétés privées européennes. Objectif final, rattraper et dépasser les concurrents américains SpaceX et Blue Origin.
Car l’Europe, privée depuis 2023 de la coopération avec la Russie et ses fusées Soyouz qui envoyaient en orbite les satellites européens, s’émancipe lentement mais sûrement dans l’accès à l’espace.
À l’instar d’Isar Aerospace, les entreprises allemandes HyImpulse et Rocket Factory Augsburg (RFA) sont également en bonne voie pour leurs propres lanceurs. Du côté français, la filiale d’Arianegroupe MaiaSpace développe son lanceur spatial partiellement réutilisable pour 2026.
La start-up française Latitude produit quant à elle le micro-lanceur Zéphyr et son moteur imprimé en 3D, pour proposer des services de lancement orbital adapté aux nano-satellites.
Enfin, l’espagnol PLD Space est également engagé dans cette course spatiale avec ses fusées réutilisables (missions prévues pour 2025) et ses lanceurs Miura, pour des missions vers la Lune et Mars.
Les prochaines années seront donc déterminantes pour la conquête spatiale européenne, qui pourrait connaître un tournant dès le 27 mars 2025 avec Spectrum.