Le lancement des premiers réseaux 5G débutera à partir de 2021. Mais cette nouvelle technologie inquiète. Dimanche dans une tribune au JDD, une soixantaine d'élus de différents partis de gauche demandent un moratoire sur cette nouvelle technologie dont ils pointent les conséquences écologiques, sanitaires mais aussi l'absence de débat démocratique. Peur des ondes, menace sur l'indépendance nationale, société hyperconnectée : faut-t-il craindre cette nouvelle technologie, présentée comme le socle d'une nouvelle révolution industrielle et défendue encore ce lundi par le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire ?
Un enjeu économique majeur
Le déploiement du réseau 5G doit permettre le développement de nouveaux usages industriels et grand public. Selon Nicolas Guérin, président de la Fédération française des télécom, elle est attendue par les consommateurs. "C'est une technologie qui va permettre d'aller 50 fois plus vite que les technologies précédentes. Elle fait entrer le mobile dans le monde de la quasi instantanéité. Mais ce serait réducteur de réduire la 5G à ces deux aspects. La 5G est d'abord une réponse aux attentes des consommateurs. Cela va permettre d'apporter plus de débit dans certains territoires dans lesquels les réseaux fixes ne peuvent pas aller", assure-t-il.
Du côté de l'industrie, l'attente est également forte. Comme le rappelle Nicolas Guérin, "c'est un enjeu de compétitivité qui doit permettre à notre pays de se doter des technologies de demain capable de concurrencer ce qui se développe en Asie ou en Amérique". "La dorsale technologique de l'économie de demain, ce sera la 5G", ajoute Stéphane Dubreuil, spécialiste des télécoms.
Les effets sanitaires questionnés
Pour autant, les effets sanitaires de la 5G inquiètent. En France, des groupes se sont même mobilisés pour démonter des antennes, craignant la diffusion massive d'ondes. "Nous n'avons pas aujourd'hui de rapport indépendant sur l'impact sanitaire", rappelle Delphine Jamet, adjointe au maire EELV de Bordeaux, Pierre Hurmic, signataire de la tribune dans le JDD. "Il faut regarder les études scientifiques. Il n'y a pas d'étude. On s'apprête à déployer un réseau qui utilise des ondes d'un genre nouveau et cela sans avoir la moindre idée des effets que cela peut avoir sur la santé au niveau des humains", poursuit Nicolas Bérard, journaliste et auteur de 5G mon amour, enquête sur la face cachée des réseaux mobiles.
"Trente et un pays ont lancé dans le monde la 5G, 14 études d'agence sanitaire indépendante ont conclu qu'il n'y avait aucun problème de santé. Ces agences ce sont celles de l'Allemagne, de la Norvège, de la Finlande", rétorque Nicolas Guérin. Il rappelle qu'actuellement, 85.000 sites mobiles émettent des ondes et que 10.500 antennes seront déployées d'ici à 2025. Une obligation pour répondre aux attentes à l'issue de l'attribution des fréquences, le 29 septembre prochain. Ces enchères doivent permettre d'attribuer aux opérateurs 11 "blocs" de fréquences dans la bande allant de 3,4 à 3,8 gigahertz (GHz), et ouvrir la voie à de premiers services 5G commerciaux dans certaines villes françaises d'ici à la fin de l'année.
L'impact environnemental
Outre l'impact des ondes sur le corps humain, les opposants à la 5G pointent également les conséquences environnementales d'une telle technologie. Actuellement, l'utilisation d'Internet représente déjà 4% des émissions de gaz à effet de serre. "Il y a aussi des opérateurs, des sénateurs qui demandent ce moratoire", rappelle Delphine Jamet. "On n'est plus dans le même contexte qu'avant. Il y un contexte mondial économique, mais aussi un contexte de dérèglement climatique qui fait l'unanimité. Il faut étudier cet impact."
"On a 77% des Français qui ont un smartphone, 94% l'utilisent chaque jour, 51% des connexions internet se font via un mobile et on change chaque année 20 millions de terminaux. Le vrai sujet c'est la sobriété", assure Nicolas Guérin. "C'est éduquer les populations, parler avec les usagers et avoir une consommation plus raisonnable."
Demain, une société hyper-connectée ?
Plus largement, pour les acteurs du débat, la généralisation de la 5G pose une question philosophique. Souhaite-t-on vivre dans une société hyper-connectée ? "Ce n'est pas lié à la 5G, c'est déjà le cas", répond Stéphane Dubreuil, qui accuse une frange de la population et de la classe politique d'agiter "les chiffrons rouges" à l'approche de l'élection présidentielle de 2022.
Quant aux menaces d'espionnage ou de pillage des données, il rappelle les règles européennes très protectrices en la matière. Des "garde-fou", alors que les Gafa (Google, Apple, Facebook ou encore Amazon) utilisent déjà les données personnelles des consommateurs.