Contrôles routiers, porte-à-porte, drone, équipe cynophile: quelque 70 gendarmes étaient toujours déployés lundi pour retrouver la trace de Morgane, une collégienne de 13 ans disparue depuis une semaine dans le petit bourg breton de Pabu (Côtes-d'Armor), où certains habitants ne cachent pas un sentiment d'angoisse et d'impuissance.
Plus de 100 auditions menées par la gendarmerie
Les recherches entamées dès le 25 novembre après le signalement de cette "disparition inquiétante" ont repris avant même le lever du jour à proximité du domicile de l'adolescente, a indiqué à des journalistes Jean-Baptiste Gautier, commandant de la compagnie de gendarmerie de Guingamp, qui pilote les opérations. "Ce matin on a contrôlé toutes les personnes qui empruntaient le trajet habituel de l'adolescente" pour se rendre au collège "en partant du principe que ces personnes étaient pour leur grande majorité ceux qui l'empruntaient lundi dernier" et ont pu croiser Morgane, a-t-il expliqué.
"On a pu recueillir le témoignage de tout le monde, que ce soit automobilistes, piétons, chauffeurs de bus, passagers", poursuit le commandant Gautier. Mais elle ne s'est jamais rendue à l'arrêt de bus où elle devait prendre le car scolaire à 7h20, a confirmé lundi le procureur de Saint-Brieuc, Nicolas Heitz, lors d'un point de presse. "Le chauffeur de l'autocar l'a confirmé, il a même attendu quelques secondes de la voir arriver, en vain", a-t-il souligné.
L'adolescente, qui s'était disputée avec ses parents au cours du week-end concernant son utilisation excessive des réseaux sociaux, ne s'est pas non plus présentée au collège. Aucun témoin n'aurait vu Morgane après qu'elle a quitté le domicile de ses parents à 7h14 ce matin-là. Et les enquêteurs ont trouvé dans sa corbeille un "papier froissé où il était indiqué papa, maman, désolée, je pars". Les gendarmes multiplient depuis une semaine les enquêtes de voisinage, les survols par drone ou hélicoptère et sondent les cours d'eau voisins.
En fin de matinée, une équipe de quatre gendarmes en uniformes arpentait encore sous une pluie intermittente une rue de Guingamp menant à Pabu, s'arrêtant à chaque habitation pour frapper aux portes et interroger les occupants, ont constaté des journalistes de l'AFP. Selon Nicolas Heitz, les enquêteurs ont effectué 110 auditions de témoins depuis lundi dans l'entourage familial, amical, scolaire et sportif de Morgane. "On cherche toutes traces, indices, témoignages, tout ce qui peut nous aider à avancer dans notre enquête" pour retrouver la collégienne, résume à Pabu le commandant Gautier.
"Toutes les pistes sont envisagées" selon le procureur
Fugue ayant mal tourné ? Suicide ? Accident ? "A ce stade, toutes les pistes sont envisagées, aucune n'est privilégiée", a assuré le procureur de Saint-Brieuc, qui a ouvert une information judiciaire afin qu'un juge d'instruction mène les investigations. "Est-ce qu'elle est toujours à Pabu ? Dans une commune voisine ou alors à Paris? Tous les scénarios sont possibles, c'est ça qui est angoissant", déclare à l'AFP Denise Thomas, 72 ans, sortant d'un cours de gymnastique.
"Le soir, quand je vois la nuit tomber, je me dis : où est-ce qu'elle va passer la nuit, cette gamine ?", lâche la retraitée croisée sur la place de la mairie du petit bourg de 2.800 habitants. Sa petite-fille elle-même avait peur à l'annonce de cette disparition, "elle ne voulait pas aller au collège à pied la semaine dernière : il a fallu que sa maman la conduise." "Il y a un sentiment d'impuissance aussi, parce qu'on aimerait aider, on ne sait pas quoi faire. Je le vis très difficilement, je l'avoue", ajoute une camarade de gymnastique, Claudine Connan, 72 ans.
"J'en ai fait des cauchemars qui m'ont réveillée la nuit dernière !", assure une troisième. L'ombre de Lina, adolescente de 15 ans disparue en Alsace en septembre 2023 et dont le corps a été découvert plus d'un an après dans la Nièvre, plane dans beaucoup de conversations à Pabu, confie Denise Thomas. "Ne rien savoir, c'est ça qui est terrible", conclut Claudine Connan.