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Enlèvement en France d'un opposant au régime algérien : trois hommes mis en examen à Paris

Europe 1 avec AFP - Mis à jour le . 3 min

Amir Boukhors, influenceur algérien, avait fait "l'objet de deux agressions graves, une en 2022 et une autre dans la soirée du 29 avril 2024", a rappelé son avocat Éric Plouvier. Ces faits avaient d'abord fait l'objet d'une enquête ouverte au parquet de Créteil. Puis les investigations ont été reprises par le Pnat en février dernier.

"Une affaire d'Etat" ou "un dossier vide" ? Trois hommes, dont un travaille dans l'un des consulats d'Algérie en France, ont été mis en examen vendredi à Paris, soupçonnés d'être impliqués dans l'enlèvement fin avril 2024 sur le sol français d'un opposant au régime algérien, l'influenceur Amir Boukhors.

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Ils sont poursuivis pour arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire suivie de libération avant le 7e jour, en relation avec une entreprise terroriste, a indiqué samedi le parquet national antiterroriste (Pnat), confirmant des informations obtenues par l'AFP de sources proches du dossier. Ils sont également mis en examen pour association de malfaiteurs terroriste criminelle.

"La question de l'immunité diplomatique se posera dans la procédure"

Vendredi soir, une juge des libertés et de la détention a placé en détention provisoire ces hommes âgés d'une cinquantaine à une soixantaine d'années, avait constaté une journaliste de l'AFP. L'un d'eux travaille dans un consulat d'Algérie en France, d'après plusieurs sources proches du dossier.

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"La question de l'immunité diplomatique se posera dans la procédure" pour ce suspect, qui ne bénéficie pas d'un passeport diplomatique, mais d'un passeport de service, a souligné l'une des sources. L'enquête a aussi mené à un "père de famille" franco-algérien, "proche" de ce membre du consulat, selon plusieurs sources proches du dossier. Le troisième suspect connaissait les deux premiers.

L'analyse du bornage téléphonique a conduit les enquêteurs jusqu'au consulat d'Algérie, a appris l'AFP de source proche du dossier. Sur les quatre gardes à vue, révélées par le journal Le Parisien, une a été levée.

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"Situation tellement grave"

Amir Boukhors, alias "Amir DZ", est un influenceur algérien installé en France depuis 2016, dont l'Algérie réclamait le retour pour le juger. Alger a émis neuf mandats d'arrêt internationaux à son encontre, l'accusant d'escroquerie et d'infractions terroristes. En 2022, la justice française a refusé son extradition. Amir DZ a obtenu l'asile politique en 2023.

Agé de 41 ans et suivi par plus d'un million d'abonnés sur TikTok, il a fait "l'objet de deux agressions graves, une en 2022 et une autre dans la soirée du 29 avril 2024", a rappelé à l'AFP son avocat Eric Plouvier. L'enquête, ouverte au parquet de Créteil, a été reprise par le Pnat en février dernier.

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"Ce tournant judiciaire, avec l'arrestation d'agents liés au régime algérien et leur présentation à un juge, révèle que les faits du 29 avril 2024 sont une affaire d'Etat", a affirmé Me Plouvier. "L'Algérie, n'a pas hésité à mener une action violente sur le sol français par l'intimidation et la terreur", a dénoncé l'avocat.

Alger a d'abord "tenté de le neutraliser avec les mandats d'arrêts" puis, devant le refus de l'extrader, "a voulu venir le chercher directement sur le sol français en l'enlevant", a avancé le conseil.

"La situation est tellement grave que le Pnat s'est saisi", a souligné le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, en marge d'un déplacement dans le Tarn. "Je laisse l'autorité judiciaire démêler les fils de cette affaire", "peut-être" liée à un "acte d'ingérence étrangère", a-t-il ajouté.

Enlevé le 29 avril 2024 dans le Val-de-Marne, l'influenceur avait été relâché le 30. Dans sa plainte, consultée par l'AFP, Amir DZ avait raconté aux policiers que ses ravisseurs avaient "fait les surpris" en découvrant son identité, pensant plutôt "qu'il avait détourné un camion de drogue", puis l'avaient libéré.

Autre enquête, liée au consulat

Samedi, une source proche du dossier a appelé à la prudence après les trois mises en examen, redoutant que la suite des investigations ne révèlent "un dossier vide", avec des suspects apparaissant comme des fusibles. Les avocates des mis en cause, dont Véronique Massi et Clotilde Garnier, n'ont pas souhaité s'exprimer. Le nom d'Amir Boukhors est récemment apparu dans une autre information judiciaire, celle-ci ouverte par le parquet de Paris.

Dans ce dossier, un employé du ministère français de l'Economie a été mis en examen en décembre, soupçonné d'avoir livré des informations sur des opposants au régime algérien, dont Amir Boukhors, à "une personne de nationalité algérienne travaillant au consulat d'Algérie de Créteil", selon le parquet.

D'après une source proche de cette enquête, cet agent demandait à l'employé de Bercy des informations sur des ressortissants algériens, dont des opposants connus tels que Amir Boukhors et Mohamed Larbi Zitout, ou encore un journaliste réfugié, un Algérien ayant porté plainte en France contre un général, des personnalités comme l'influenceur Chawki Benzehra.

Ces personnes ont, pour "certaines", été "victimes de violences, menaces de mort ou tentative d'enlèvement", a souligné cette source proche, sans donner davantage d'éléments sur le lien éventuel de causalité.