En ce début d'après-midi du 16 mai, l'ex-étoile montante de LR, devenue éphémère prise de guerre de la macronie, assure aux deux juges d'instruction parisiens que son "innocence (est) totale et pleine", selon des éléments de son interrogatoire consultés samedi par l'AFP. "Je n'ai jamais drogué, ni violé, ni tenté de violer, ni agressé une femme", lance l'actuel député de l'Ain (apparenté Renaissance) à l'orée de 4H30 de questions-réponses.
Trois femmes sont parties civiles : Laëtitia et Chloé, deux prénoms d'emprunts, et Margaux. Après des témoignages dans Mediapart, la plainte de la première a déclenché la procédure judiciaire. Dans la tourmente, Damien Abad était sorti du gouvernement au bout d'un mois, début juillet 2022.
Une plaignante s'est dit surprise par sa "force considérable"
D'après Laëtitia, il a voulu la contraindre à une fellation lors d'une soirée au domicile de celui-ci, en 2010 à Paris. Surprise par sa "force considérable", Laëtitia dit s'être "débattue" et l'avoir "frappé", avant de s'échapper lors de l'irruption d'un convive, qui s'est souvenu devant les enquêteurs avoir "ouvert une porte et vu sortir" la femme. Damien Abad conteste cette version, la compatibilité avec la configuration de son appartement et sa capacité à imposer un tel rapport.
Les juges l'interpellent : "Compte tenu de vos positions respectives, il n'y a pas de place pour des problèmes d'interprétation (...). Ça s'est passé, ou ça ne s'est pas passé." "Cette scène n'existe pas", répond le mis en cause. Margaux décrit, elle, un rapport sexuel d'abord consenti à Paris début 2011 puis empreint "d'irrespect, d'injonction et d'insistance" avec une pénétration anale imposée. Pour Damien Abad, "c'est faux. Je ne peux avoir de rapport sexuel (...) sans la participation active de la personne", affirme-t-il.
L'éphémère ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées insiste sur sa maladie, l'arthrogrypose, son invalidité établie à "80% et plus", et la "multitude de gestes qu'(il) ne (peut) pas faire", s'agissant d'habillage, de toilette, de repas... mais aussi de relations sexuelles. Sa compagne actuelle confirme son besoin d'aide en la matière. Un témoignage tempéré par d'ex-partenaires.
Un spécialiste de sa maladie, que l'ancien ministre a sollicité début mars, a assuré que son handicap rendait "peu probable que (Damien Abad) puisse contraindre une femme de corpulence et de force normale à avoir un rapport sexuel sans son consentement".
Les plaignantes avancent l'hypothèse d'un recours à la soumission chimique
Mais les plaignantes avancent aussi l'hypothèse d'un recours à la soumission chimique. Laëtitia dit avoir vu "quelque chose" au fond d'un verre "offert" par Damien Abad. Elle a recraché. Chloé a "toujours eu cette conviction qu'il (l)'avait droguée et violée". Elle raconte avoir bu du champagne dans un bar parisien avec lui en 2010, avant un "black-out" jusqu'au lendemain matin où elle se réveille, désorientée, à son côté. Damien Abad relate, lui, une soirée de séduction terminée d'un commun accord à l'hôtel, sans relation sexuelle.
Margaux évoquera la "possibilité" que Damien Abad l'ait "droguée", comme le croit un de ses amis. Damien Abad nie : "Je n'ai jamais drogué ni mis quoi que ce soit dans un verre." Le député dénonce un "calendrier choisi, un outil médiatique utilisé et un environnement politique omniprésent", venant de femmes qui, bien qu'"a priori ne se connaissant pas" comme le soulignent les juges, "peuvent réécrire ou réinterpréter".
Damien Abad assure n'avoir "aucun doute sur le fait que sa totale innocence sera confirmée"
À ce jour mis en examen pour les seuls faits concernant Laëtitia et placé sous le statut plus favorable de témoin assisté pour les deux autres, Damien Abad avait assuré le 16 mai n'avoir "aucun doute sur le fait que sa totale innocence sera confirmée", s'agissant selon ses avocats, Mes Jacqueline Laffont et Robin Binsard, d'accusations "matériellement et scientifiquement impossibles".
Le conseil de Laëtitia, Me Mario Stasi, avait au contraire qualifié la mise en examen de "logique". Me Arié Alimi, avocat de Chloé, sollicité par l'AFP, évoque un "même modus operandi dénoncé par plusieurs femmes qui ne se connaissent pas". "La soumission chimique est devenue une modalité récurrente du viol en politique. Tout porte à croire qu'il sera jugé pour tous les faits dénoncés."