Millénium… Le titre qui résonne dans toutes les oreilles. La trilogie du suédois Stieg Larsson est en effet à l’origine de l’engouement des Français pour la littérature nordique. Alors que le Salon du Livre met à l’honneur la littérature nordique, le style du polar mérite un petit retour en arrière.
L’essor du polar nordique ne date pas d’hier. Il faut remonter aux années 80 pour retrouver ses racines. Le Norvégien Jon Michelet est un des précurseurs du genre. Le polar est alors relativement considéré comme un "sous-genre" littéraire. Dans les années 90, c’est le Suédois Henning Mankell qui va donner au genre ses lettres de noblesse.
La "vague" polar se propage alors à tous les pays nordiques. Arnaldur Indridason et Arni Thorarinsonn en Islande, Anne Holt en Suède, Gunnar Staalesen ou Karin Fossum en Norvège… Les dignes successeurs sont aujourd’hui légion.
Cinq pays, un seul genre
Mais, pourquoi mettre Finlande, Norvège, Danemark, Islande et Suède dans le même panier ? Pour le journaliste Erik Aashiem, correspondant à Paris de la Radio télévision norvégienne, le choix du Salon du Livre est tout à fait pertinent, car les cinq pays adoptent les mêmes codes littéraires.
A son sens, les polars des pays du Nord partagent "beaucoup de choses en commun", notamment la froideur de l’ambiance, et nombre d’éléments culturels et politiques. L’Islande et la Finlande ont par ailleurs adopté le polar, et le mode de lecture y est le même. La banqueroute islandaise d’octobre 2008 a d’ailleurs inspiré bien des plumes.
Le polar nordique, un roman social
Derrière les polars noirs se cachent en réalité de véritables pamphlets sociaux. Les écrivains désirent avant tout rompre avec l’idéalisation du système social-démocrate. Loin des clichés d’une société scandinave policée, les romanciers veulent dans un premier temps "porter un regard tranchant et incisif par rapport à des pays dont la culture est idéalisée", analyse pour Europe1.fr Nicolas Bénard, historien et membre du comité de lecture de la revue spécialisée Nordiques.
"Il y a une logique de critique de la société et des premiers effets néfastes de la mondialisation", détaille le spécialiste. "L’intrigue policière est alors secondaire, voire inexistante", analyse Nicolas Bénard. L’écrivain norvégien Joe Nesbo est l’incarnation de cette logique de désenchantement social. Son best-seller L’étoile du diable raconte les péripéties d’un serial-killer dans une Norvège marquée par la collaboration avec le régime nazi.
En France comme dans les pays nordiques, les lecteurs sont friands de critique sociale. Mais ce qui les attire également, c’est le "réalisme social" qui émane des polars nordiques. La mise en scène d’ "anti-héros" fait relativiser les lecteurs sur leur propre vie, explique ainsi Nicolas Bénard.
Le polar serait-il un genre féminin ?
Le genre littéraire attire davantage de femmes que d’hommes. Et pour cause : les romancières sont légion dans le genre du polar et souvent, elles mettent en scène "des femmes fortes", qui travaillent "dans un monde d’hommes", commente le journaliste Erik Aasheim. La plupart du temps, le personnage principal est une femme, ce qui favorise chez les lectrices un certain phénomène d’identification.
Les romans d’Anne Holt, qui racontent les enquêtes d’une commissaire du nom de Hanne Wilhelmsen, figurent parmi les lectures les plus prisées des Français amateurs de polars. Plus froids et complexes que les romans d’Agatha Christie, les polars de la suédoise Karin Fossum sont à mille lieues du roman policier de papa...