Une série racontant l'histoire d'une femme, écrite, produite et réalisée par des femmes… Cinq ans après le passage de la vague #MeToo, et alors que les combats féministes sont revenus sur le devant de la scène, le show Marie-Antoinette, diffusé sur Canal+, s'inscrit indéniablement dans l'ère du temps. La productrice Deborah Davis a ainsi pris le parti de raconter l'histoire de la jeune princesse autrichienne à travers son regard et sa perception des évènements.
"On ne peut pas s'empêcher de voir Marie-Antoinette comme moderne"
Une narration inédite et féministe ? Indéniablement. Pourtant, il n'a jamais été question pour Deborah Davis et Stéphanie Chartreux, les productrices de Marie-Antoinette, ainsi que leurs
co-productrices Margaux Balsan et Claude Chelli d'ériger ce personnage en icône féministe. "Deborah Davis voulait avant tout apporter un regard différent sur son histoire. Elle voulait la raconter différemment", explique à Europe 1 Stéphanie Chartreux, pour qui "on ne peut pas s'empêcher de voir Marie-Antoinette comme moderne" car l'épouse de Louis XVI était une femme évoluant dans un milieu hostile.
Marie-Antoinette et Lady Diana, deux femmes qui défendaient un droit à la vie privée
Les premiers épisodes de Marie-Antoinette suivent l'arrivée de la princesse en France, alors qu'elle n'avait que 14 ans. Marie-Antoinette rejoint son époux Louis XVI, le Dauphin de France. Elle quitte son pays, sa famille, laisse derrière elle tous ses repères. Elle n'est pourtant qu'une enfant.
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Naïve et innocente, elle débarque à la cour sans en comprendre les codes. Loin de l'image vaniteuse que le personnage de Marie-Antoinette a dans le film Marie-Antoinette de Sofia Coppola, sorti en 2006, Marie-Antoinette, dans la série proposée par Canal+ apparaît d'abord comme une adolescente naïve et innocente, débarquant dans un monde dont elle ne comprend pas les codes. "Comme Lady Di, Marie-Antoinette a eu une préparation à la vie royale un peu juste", souligne Stéphanie Chartreux.
Et comme Diana, Marie-Antoinette a fini par intégrer ces codes pour mieux s'en émanciper. "Elles défendaient un droit à la vie privée", assure la productrice de la série pour Europe 1. "La reine Elizabeth II ne faisait qu'un avec son devoir, elle était toute dévouée à sa vie publique. L'inverse est vrai de Diana comme de Marie-Antoinette, qui aspiraient à être une personne privée et qui étaient en guerre contre leur rôle public", assure également Deborah Davis dans une interview pour Le Point.
Le corps de Marie-Antoinette devenu un objet public et politique
L'intrigue de Marie-Antoinette se concentre sur une question : Marie-Antoinette et Louis VXI vont-ils oui ou non réussir à avoir des relations sexuelles pour donner à la France un héritier "mâle" assurant l'union entre la France et l'Autriche et éviter une guerre ?
Ce choix scénaristique de Deborah Davis est bien évidemment féministe puisqu'elle montre à quel point Marie-Antoinette était dépossédée de son propre corps, devenu un objet public et politique. "On voulait montrer le poids que cela faisait peser sur la jeune femme", explique Stéphanie Chartreux. Trois siècles plus tard, la question du droit des femmes à disposer librement de leur corps est toujours d'actualité.
Alors, si Deborah Davis n'a pas souhaité ériger Marie-Antoinette en héroïne féministe, comme le souligne Stéphanie Chartreux, la réalisatrice de la série de Canal+ montre bien à quel point elle était moderne. Et, la narration de Marie-Antoinette, qui donne de la densité au personnage en se concentrant sur ses ressentis et sa psychologie, est féministe. Car, pour la première fois, Marie-Antoinette n'est pas uniquement présentée comme l'épouse de Louis XVI, vouée à un destin tragique, mais comme une femme joyeuse, libre et rebelle, passionnée de mode et de musique. Rien que pour ça, la série Marie-Antoinette, portée par la lumineuse Emilia Schüle, vaut définitivement le coup d'œil.