C'est un écrivain "né dans une serre". De sa passion pour les plantes, Didier Van Cauwelaert, auréolé du prix Goncourt pour Un aller simple, vient de faire paraître Les émotions cachées des plantes. L'écrivain a hérité cette passion pour l'horticulture de sa mère. Invité samedi de La table des bons vivants, le romancier a évoqué sa famille et la cuisine.
A la faveur d'un œuf dur. Les deux ne sont d'ailleurs pas sans rapport. Car c'est en quelque sorte un aliment qui est à l'origine de la rencontre des parents de l'écrivain : l’œuf dur. "Mon père avait eu un divorce très douloureux pour lui, il était un peu en perdition. Il roulait toute la nuit", raconte le romancier. Un soir de fin d’année, son père débarque à la station de Valberg, près de Nice, et va en boîte de nuit. "Il y avait un concours de Miss gobeuse d’œufs et c’est là qu’il a rencontré ma mère, jeune étudiante en droit, très belle… et elle a gagné le concours. Et mon père est tombé raide amoureux", poursuit-il, souriant en évoquant le paradoxe du physique à la Ava Gardner de sa mère associé au met au manque certain de sexy.
Vin tuilé. A l'image de cet aliment sans fioriture, l'écrivain dit aimer "les choses très simples" tout comme "les alliances inattendues". Côté vin, il avoue une préférence pour le bourgogne, "blanc comme rouge". Il conseille également deux vins produits aux alentours de Nice, sa région natale : le peu connu "vin de Bellet" et "à Saint-Jeannet, le vin tuilé. C'est une découverte empirique. Des charpentiers travaillaient et ils ont oublié une bouteille sur un toit de tuile et des mois après, on a repris cette bouteille qui avait un goût extraordinaire", conclut le romancier.
Le questionnaire des bons vivants
Pour mieux le connaître côté fourchette, l'écrivain est passé sur le gril des interrogations de Laurent Mariotte :
Le goût de votre enfance ?
La socca. C'est une galette typiquement niçoise à la farine de pois-chiche et ça se mange au Cours Saleya en marchant. Depuis quelques années, des producteurs niçois en ont fait un dérivé, ils ont inventé la chips de socca. C'est super, pas gras du tout, infiniment meilleur que les chips traditionnelles.
Votre plus beau repas, dans le sens inoubliable ?
C'était Gérard Vié au Trianon Palace à Versailles, qui avait fait un repas médiéval. Il avait dans son potager des légumes qui étaient vraiment ceux du Moyen-Âge, et puis une manière de cuire les volailles, les poissons. C'était quelque chose. Aussi bien dans l’œil que dans la texture, on voyageait. J'adore quand la cuisine me raconte une histoire aussi.
Votre pire repas ?
C'est le traquenard mondain. Vous savez, les gens qui vous invitent et disent 'Venez, il y a untel qui vient'. En fait, c'est les convives qui constituent le menu. Je m'étais retrouvé une fois avec Jean d'Ormesson. Ça paraissait de la belle table mais c'était du contre-plaqué avec de la nappe blanche et il y avait du plat de traiteur insipide et frugal. Au dessert, ensuite, la maîtresse de maison s'extasiait. Il y avait des grandes coupelles avec des pastilles multicolores. En fait, c'était des "Smarties" et on se regardait avec d'Ormesson et on se disait 'Mais c'est pas possible'. A l'issue de ce dîner, on est allé souper avec d'Ormesson dans une vraie brasserie. Ça creuse les dîners mondains !
Le plat que vous ne pouvez pas manger ?
La cervelle ! L'idée-même...
Quel est votre mot préféré en cuisine ?
Déglacer, aussi bien au sens propre, recueillir un suc avec un vin, un Porto et Madère et c'est un très beau mot. Il y a l'idée de réchauffe, d'enfance.
Quels sont les invités de votre dîner idéal ?
Trois personnes que j'ai connues qui étaient des convives merveilleux : Frédéric Dard, Jean Carmet et Charles Trenet. C'était des repas inoubliables, de la vie, en particulier avec Charles Trenet - qui est je pense la personne que j'ai vu le plus manger et boire sans que l'on ne voit aucune différence pendant les quatre-cinq heures que duraient les repas - c'était fabuleux. Son esprit s’aiguisait, ses jeux de mots étaient de plus en plus percutants. C'était une alchimie incroyable.
Le mot de la F-A-I-M ?
Encore !