Ce sommet européen, qui s'est ouvert jeudi après-midi, ne sera "ni historique", ni "celui de la dernière chance". Les 27 dirigeants des États de l'Union européenne sont une nouvelle fois rassemblés, plus de trois mois après le sommet crucial du 28 juin et l'adoption du pacte de croissance. Et cette fois, ils seront un peu plus détendus, la situation s'étant en partie améliorée : marchés rassurés, taux d'intérêt en baisse... Pour autant, si de nombreuses avancées sont en marche, beaucoup d'autres dossiers stagnent. Et ce en partie à cause des divergences franco-allemandes. François Hollande et Angela Merkel se sont en effet livrés à un bras de fer par journaux interposés mercredi soir. Europe1.fr fait le point sur ce qui a changé, et ce qui bloque encore en zone euro.
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CE QUI A CHANGE DEPUIS LE 28 JUIN
• L'adoption du traité. À l'instar de la France, le traité européen instaurant un pacte budgétaire passe l'épreuve de la ratification dans de nombreux pays. Il reste une dizaine de pays encore un peu à la traîne. Mais parmi eux, seuls deux laissent place au doute. En Finlande, le gouvernement refuse de payer pour les erreurs de gestion des autres. En Pologne, les deux chambres ont déjà entériné le traité mais le président de la République n’a pas encore apposé sa signature. Il réclame plus de pouvoir décisionnel pour son pays au sein l’UE.
• La ratification du "pompier de l'Europe". La Zone euro a inauguré le 8 octobre le Mécanisme européen de stabilité financière, MES de son petit nom, juste après avoir été validé par la Cour constitutionnelle allemande. Il va progressivement devenir opérationnel d'ici cinq ans. Le MES, c'est cette cagnotte collective alimentée à hauteur de 700 milliards d'euros par les Etats, qui aura vocation à prêter de l’argent aux pays de l'union monétaire, lorsque ces derniers n’arriveront plus à emprunter sur les marchés.
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• La BCE passée à l'illimitée. La Banque centrale européenne a rassuré les marchés début septembre, en annonçant qu’elle achètera, sur le marché secondaire, des obligations d'Etat d'une échéance de 1 à 3 ans et ce sans limite "quantitative". En clair : elle se dit prête à délester sans limite les banques des dettes de pays en difficulté. Une annonce qui a pour but de pousser les marchés à prêter aux Etats avec des taux d'emprunt plus faibles.
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CE QUI BLOQUE ENCORE
• La mutualisation des budgets. François Hollande comme Angela Merkel veulent tous deux plus d'Europe dans les budgets des États, mais avec des conceptions bien différentes. Le président français souhaite plus de "solidarité", par la mise en place des eurobonds, c'est-à-dire la mutualisation des dettes des pays de la Zone euro. La chancelière allemande veut plus de "contrôle", et n'hésite pas à appeler à "l'ingérence" de l'Europe dans les budgets des États pour les surveiller.
"L'Allemagne ne veut pas entendre parler d'une mutualisation des dettes, à un an de ses propres élections générales, sans avancer vers davantage d'union politique", résume le correspondant bruxellois du Monde, Philippe Ricard. Et de poursuivre : "Elle a le souci de procéder aux transferts de souveraineté permettant de peser sur les choix budgétaires et économiques des pays de l'union monétaire. La France de François Hollande, elle, tergiverse et lie tout progrès en termes d'intégration à de nouveaux efforts de solidarité."
Sur ce sujet, l'Allemagne envisage de nouveaux traités constitutionnels dès 2013, avec création d'un ministère européen des Finances. François Hollande repousse toute avancée politique au-delà de 2014.
• La supervision bancaire. L'union bancaire, l'un des principaux sujets de jeudi, fait l'objet d'une vive divergence de calendrier entre François Hollande et Angela Merkel. Le projet prévoit notamment de créer une autorité qui aura pour mission de contrôler les banques afin de vérifier qu'elles ne prennent plus de risques démesurés et ne s'endettent pas outre-mesure. "Je veux que toutes ces questions soient réglées d'ici la fin de l'année", a déclaré jeudi François Hollande, dans une interview à six quotidiens européens, dont Le Monde et le Suddeutsche Zeitung.
Mais l'Allemagne laisse entendre qu'aucune décision n'est à attendre à court terme. "La France et l'Allemagne s’opposent notamment sur le périmètre d’application, comme par exemple sur le fait d’inclure uniquement les deux ou trois dizaines de banques d’envergure systémique, ce qui permettrait à la Bundesbank de garder le contrôle de ses nombreux acteurs régionaux", explique au journal LesEchos l'économiste Jean de Castries.
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