Depuis le début du mois, les marchés bruissent d'une rumeur : la Banque centrale européenne (BCE) pourrait intervenir pour baisser ses taux d'intérêt. Et ce, dès jeudi prochain. Une perspective qui a tant enthousiasmé les marchés que le CAC 40 a réalisé sa plus forte hausse de l'année mardi dernier (+3,58%).
C'est Mario Draghi, le président de la BCE, qui a sous-entendu ce geste dans le langage très codé de l'institution de Francfort. La BCE est "prête à agir", a-t-il ainsi déclaré le 4 avril. "Dans les semaines à venir, nous suivrons de très près toutes les informations ayant trait aux évolutions économiques et monétaires, afin d'en évaluer l'impact sur les perspectives en matière de stabilité des prix", a-t-il assuré. Autrement dit, la BCE n'exclut pas un geste prochain pour soutenir l'activité, notamment via son principal instrument : l'évolution de ses taux.
Pourquoi baisser les taux ? Parce que la reprise ne pointe toujours pas à l'horizon. Début mars, la BCE a revu à la baisse ses perspectives de croissance pour la zone euro, tablant désormais sur une récession entre -0,1% et -0,9% en 2013 et une légère croissance de 0% à 2% pour 2014. Même si le taux directeur de la BCE, c'est-à-dire le taux d'intérêt auquel elle octroie des crédits aux banques européennes, est à son plus bas historique (0,75%) depuis juillet, il pourrait donc être encore abaissé pour soutenir l'activité dans la zone euro. Car baisser les taux d'intérêt, c'est permettre aux banques européennes d'emprunter pour moins cher, et donc de prêter pour moins cher. Un coup de pouce bienvenu pour les PME européennes qui peinent à trouver des financements.
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Pourquoi maintenant ? Parce que deux indicateurs viennent de confirmer que l'économie européenne fait du surplace. D'abord, l'activité privée s'est encore contractée en zone euro, et notamment en Allemagne. Ensuite, la confiance des entrepreneurs allemands a chuté contre toute attente, alors qu'on attend de la première économie européenne qu'elle tire la zone euro hors de la crise. De plus, la chancelière allemande Angela Merkel, habituellement très réservée sur la question des taux, s'est exprimée sur le sujet il y a quelques jours : alors que l'Allemagne aurait plutôt besoin de taux plus hauts pour prévenir tout risque d'inflation, la chancelière a admis que "pour d'autres pays, (la BCE) aurait besoin d'agir un peu plus pour s'assurer que les entreprises ont accès au financement".
Mais pour certains observateurs, la BCE pourrait en fait agir plus tard : "l'exact moment de la décision est une question délicate, mais nous pensons que juin est plus probable que mai, parce que la BCE aura alors en mains les chiffres du premier trimestre", anticipe Nikolaus Keis, analyste chez UniCredit.
Mais prudence : Jörg Asmussen, membre du directoire de la BCE, l'a répété : baisser encore le coût de l'argent n'est pas une solution magique. "La répercussion de baisses des taux à la périphérie serait limitée, or c'est là qu'elle serait le plus nécessaire", a-t-il dit. Mario Draghi a toutefois précisé que le conseil des gouverneurs de la BCE discutait de plusieurs "instruments", y compris de mesures non conventionnelles qui rentreraient dans le mandat – restreint – de la BCE.