Ce qui devait être une grande avancée en terme de transparence sur le contenu de nos assiettes a rapidement viré au fiasco : moins d’un an après son lancement, le label "Fait maison" est un échec, contesté par beaucoup et revendiqué par moins de 10% des restaurants. La secrétaire d'Etat au Commerce Carole Delga a pris acte de ce revers et réuni mardi les professionnels du secteur pour faire évoluer ce label d’ici la fin du mois d’avril. Désormais, le "Fait maison" se veut plus strict. Suffisamment pour convaincre les gourmets ?
Qu’est-ce que le label "Fait maison" ? Apparu le 15 juillet 2014 sur les cartes des restaurants, son principe est simple : il doit permettre au consommateur d’identifier "un plat entièrement cuisiné/transformé sur place, à partir de produits bruts", dixit le ministère de l’Economie. Et ce dernier de préciser : "le logo ‘fait maison’ répond au souci de mieux informer le consommateur (…). L’objectif essentiel est de lui permettre de bien distinguer la cuisine d’assemblage, faite à partir de préparations industrielles, de la cuisine confectionnée à partir de produits bruts comme on le fait traditionnellement dans une cuisine".
Un logo qui n’a pas convaincu. Si le principe est limpide, jouer la carte de la transparence, son application est bien plus compliquée. Neuf mois après son entrée en application, rares sont les restaurants à afficher le fameux logo d’une casserole surmontée d’un toit de maison. Comment expliquer un tel échec ? Du côté des restaurateurs, les raisons sont multiples : ceux qui cuisinent tous leurs aliments de A à Z ont refusé de jouer le jeu car leurs concurrents pratiquant la cuisine d’assemblage pouvaient facilement revendiquer aussi ce label. Sans oublier que le fait d’accoler un logo à côté des plats faits maison, c’est aussi montrer que le reste de la carte ne l’est pas : pas vraiment idéal pour rassurer le consommateur. En outre, les restaurants qui affichent ce logo pouvaient se faire davantage contrôler par la Répression des fraudes.
Du coté des consommateurs, la greffe n’a pas pris non plus, et pas seulement parce qu’ils ont rarement croisé ce logo. Lorsque ce pictogramme a fait son apparition l'an dernier, les médias ont en effet analysé ce qu’il voulait dire et montré ses limites : le fait maison ne veut pas dire frais, si bien qu’un restaurateur peut utiliser des légumes surgelés ou sous vide, déjà épluchés et découpés. S’il les cuit ensemble, sa ratatouille peut alors revendiquer l’appellation "Fait maison". Les fonds de sauce peuvent également être utilisés, alors même qu’il s’agit d’une des principales astuces pour redonner du goût à la cuisine d’assemblage. Bref le "Fait maison" peut ne l’être qu’en partie, voire de manière infinitésimale.
Le gouvernement durcit les règles du jeu. Après avoir rencontré mardi les représentants du secteur, la secrétaire d'Etat au Commerce a reconnu que ce label "ne suscitait pas la confiance du fait de toutes les exceptions qui étaient listées". Carole Delga a donc décidé de faire évoluer ce label pour qu’il ne tombe pas dans l’oubli. A partir du mois de mai, les conditions pour revendiquer ce label seront un peu plus dures.
Qu’est-ce qui change ? Pas mal de choses, preuve que le dispositif existant n’était pas satisfaisant. Premier changement, et pas des moindres : l’obligation d’utiliser des "produits bruts" est remplacée par celle de recourir à des "produits crus" : en clair, les légumes surgelés ou précuits et emballés sous vide ne peuvent plus être utilisés dans un plat estampillé "Fait maison". Y compris la salade sous vide.
La liste des exceptions est par ailleurs simplifiée. Parce qu’un restaurateur ne peut pas tout faire lui-même, il était prévu qu'il puisse utiliser des produits préparés par d'autres : charcuteries, pâtes, pain, etc. Sauf que cette liste était un peu trop longue, si bien qu'il a été décidé de la raccourcir. Ainsi, la pâte feuilletée n'en fait plus partie. La réforme en cours prévoit aussi de mettre fin à certains abus : en combinant les nombreuses exceptions possibles, certains restaurants revendiquaient l'appellation "Fait maison" sur certains plats alors qu'ils n'avaient que combiné des préparations achetées à l'extérieur. Les restaurateurs jouant avec toutes ces exceptions ne pourront plus revendiquer le logo "Fait maison".
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