Supprimer deux jours fériés. C'est une des propositions choc du Medef pour relancer l’emploi en France : "le nombre de jours fériés et les complexités d’organisation qu’ils induisent sont un frein à la croissance et donc, à l‘emploi". Le Medef avance qu’avec 5 millions de chômeurs, "il ne doit plus y avoir de sujet tabou". À la clef selon les calculs du syndicat des patrons, 100.000 emplois et 1% de croissance en plus. Avec ses 11 jours chômés, la France gagnerait-elle de l'argent à en supprimer quelques uns ?
>> LIRE AUSSI - Le plan choc du Medef contre le chômage
"Il n’y a pas de spécificité française". Non, la France n’abuse pas. Avec ses 11 jours fériés, "la France est dans la moyenne", selon Xavier Timbeau, directeur du département analyse et prévision de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). "Il n’y a pas de spécificité française, il y a même des pays qui en ont plus", a-t-il ajouté.
Le débat n’est pas non plus franco-français. Il existe ailleurs et notamment au Portugal qui, en 2012, a décidé de supprimer d’un coup quatre jours fériés.
>> LIRE AUSSI - Pacte de responsabilité : les entreprises ne jouent pas le jeu
La France pas gâtée en jours fériés. La France se situe même au bas de l’échelle comparée aux autres pays européens. Si le Royaume-Uni n’a que huit jours fériés, la Grèce en a 12, l’Autriche 12 et l’Espagne 14. Le cas de l’Allemagne est particulier car le nombre de fériés varie selon les länder.
Alors, les fériés, perte de richesse ? Si on sort des frontières de l’Europe, le Japon et la Corée du sud par exemple profitent de 15 jours fériés par an et ils ne sont pas réputés pour être des pays pauvres.
Ce nombre de jour fériés est cependant à nuancer avec le nombre de congés payés dont bénéficient les travailleurs français : 25 jours, auxquels il faut ajouter les RTT. Et sur ce point, la France est bien pourvue. Xavier Timbeau avance d’ailleurs qu’il serait plus efficace de supprimer des RTT que des fériés : "Jouer sur les RTT permet plus de souplesse, l’employeur peut négocier avec le salarié lequel enlever".
Le 14 juillet, jour férié commémorant la prise de la Bastille en 1789.
1% de croissance gagné, vraiment ? Non seulement la France n’a pas trop de fériés mais en supprimer deux ne rapporterait en aucun cas 1% de croissance, comme l’avance le Medef. Selon une étude de l’Insee, l’ensemble des jours fériés de 2013 équivaut à une perte de 0,1% sur la croissance seulement. On est donc très loin du 1%.
Xavier Timbeau de l’OFCE ne dit pas autre chose : "1%, c’est exagéré". Mais il est évident qu'avec la suppression de deux jours fériés, les employeurs sont gagnants car pendant ces deux jours, les employés travaillent mais ne sont pas payés.
Tous les jours fériés ne se valent pas. La somme engrangée en supprimant des fériés varieraient selon les années. Toujours selon l’Insee, la croissance perdue à cause des jours fériés a été particulièrement faible en 2012 car ils sont tombés souvent un samedi ou un dimanche. Plus concrètement, imaginons que le prochain 1er novembre qui tombe un samedi ne soit pas férié, les effets seraient limités car beaucoup de personnes ne travaillent de toute façon pas ce jour-là.
Un jour férié, ça rapporte. Les jours fériés permettent aux Français de profiter d’activités de loisirs, voire de s’échapper le temps d’un weekend prolongé. Ils peuvent être aussi des jours de très fortes consommations, Noël par exemple. Le secteur du commerce et du tourisme serait donc perdant si on décidait de supprimer des jours chômés.
Supprimer les fériés, on connaît la musique. Avant la révolution française, on comptait en France près de 50 jours fériés. Et comme le rappelle Xavier Timbeau : "Autrefois les fériés remplissaient le rôle de congés mais quand les congés payés se sont formalisés, les fériés sont apparus inutiles et ont été supprimés peu à peu".
>> LIRE AUSSI - Pourquoi le Medef veut repousser la retraite à 65 ans