L'INFO. Un magasin Bricorama fermera ses portes le 31 décembre à Montigny-le-Bretonneux, dans les Yvelines, supprimant ainsi 23 postes. Pour la direction, c'est l'interdiction d'ouvrir le dimanche qui est à l'origine de ses problèmes. "Ça a été le coup de grâce", dénonce mercredi sur Europe1 Jean-Claude Bourrelier, PDG de Bricorama, qui parle de 100.000 euros de manque à gagner par mois depuis novembre 2012. "Je ne ferme pas par plaisir ou pour faire le buzz. Un chef d'entreprise joue le rôle de grand méchant seulement quand il en est obligé", assure le dirigeant. Bricorama, qui emploie plus de 2.600 salariés en France dont 300 qui travaillent le dimanche, avait menacé l'an dernier de supprimer 500 postes suite à cette interdiction. Il commence ainsi à mettre sa menace à exécution.
Pourquoi Bricorama a dû fermer le dimanche ? C'est la cour d'appel de Versailles qui a décidé de l'interdiction en novembre dernier. Elle enfonçait alors un clou que le tribunal de grande instance de Pontoise avait planté quelques mois plus tôt. L'ouverture d'un commerce le jour du seigneur n'est en effet possible que par dérogation. Mais c'est seulement envisageable pour les commerces soumis à des "contraintes de production" et répondant aux "besoins du public", dans lesquels ne rentre pas les magasins de bricolages ou jardinages (voir la liste ici) . La loi prévoit certes qu'ils peuvent ouvrir s'ils sont situés dans une zone touristique ou un "périmètre d'usage de consommation exceptionnelle", dit PUCE. Mais Montigny-le-Bretonneux ne se trouve pas dans ce périmètre, ni même aucun magasin Bricorama. Et la marque n'a pas réussi à obtenir de dérogations (elles se demandent en préfecture ou en mairie), contrairement à Leroy Merlin.
Une "concurrence déloyale" ? Selon Jean-Claude Bourrelier, sa marque fait ainsi face à de la "concurrence déloyale". À cinq kilomètres du magasin Bricorama de Montigny, le concurrent Leroy Merlin peut en effet ouvrir en toute légalité, après avoir demandé et obtenu une dérogation aux justifications plutôt floues à l'heure actuelle. Une concurrence qui a entraîné une fuite des clients, devenus "plus habitués" à aller consommer chez Leroy Merlin avec le temps. "La question n'est plus de savoir si je suis pour ou contre la fermeture du dimanche. Maintenant je me bats pour la justice", argue ainsi Jean-Claude Bourrelier.
À la justice de trancher. Bricorama a demandé et obtenu en référé, le 26 septembre dernier, du tribunal de commerce de Bobigny que ses deux concurrents nationaux (Leroy Merlin et Castorama) soient également obligés de fermer 15 de leurs établissements qu'ils continuent d'ouvrir le dimanche dans des zones où Bricorama doit fermer. Leroy Merlin et Castorama ont fait appel devant la Cour d'appel de Paris et sont en attente de la décision, rendue le 29 octobre. Et cette annonce de fermeture d'un magasin Bricorama, survenue deux semaines plus tôt, vient leur rajouter une pression supplémentaire.
Les doutes de salariés. Tout le monde n'est pas non plus convaincu par l'argumentaire de Jean-Claude Bourrelier pour justifier la fermeture de son magasin des Yvelines. Et une pointe de regret se fait ressentir chez certains salariés. "Ça me touche. Ce sont 13 ans de société, de liens tissés avec les clients, qui se tournent. On a eu une baisse de fréquentation ces derniers mois. Pourquoi ? Je ne sais pas, mais il n'y a pas que la fermeture le dimanche en cause", estime ainsi l'un des employés du rayon jardinage au micro d'Europe1, regrettant notamment un "déficit de gestion" de l'entreprise.