Après avoir longtemps résisté, le marché du travail semble être rattrapé par la dégradation du contexte économique avec un arrêt au troisième trimestre de la baisse du nombre de chômeurs inscrits à Pôle emploi. Le nombre de chômeurs (catégorie A, sans activité) est ainsi resté stable en France (hors Mayotte) au troisième trimestre par rapport au deuxième, à 3,164 millions d'inscrits (-1.700), selon les chiffres publiés mercredi par le ministère du Travail. La stabilité est identique en incluant l'activité réduite (catégories B et C de Pôle emploi) à 5,436 millions (-1.000 personnes).
Une faible baisse de 0,8% au deuxième trimestre
Sur un an, la baisse reste certes très marquée, aussi bien pour la catégorie A (-10,9%, 388.000 chômeurs de moins) que pour les ABC (-7,1%). Mais ce plateau intervient après une baisse déjà faible de 0,8% au deuxième trimestre, loin des nets reculs de 5% enregistrés au premier trimestre 2022 et au dernier trimestre 2021. Le dynamisme du marché du travail serait-il enfin rattrapé par les conséquences du ralentissement économique, de la guerre en Ukraine ou encore de la hausse des prix de l'énergie ?
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"C'est sûr que depuis le début de l'année, les mauvaises nouvelles s'amoncellent. Et il y a toujours un décalage d'un trimestre ou deux sur le marché du travail, c'est plutôt logique que le chômage arrête de baisser", commente Éric Heyer, économiste à l'OFCE. Dans sa dernière note de conjoncture, l'Insee prévoit ainsi que le taux de chômage en France devrait se maintenir à 7,4% de la population active "jusque fin 2022".
Mais l'économiste reste prudent sur les interprétations de cette stabilisation du chômage. "En dépit du ralentissement économique, les créations d'emplois ont continué d'être dynamiques au premier semestre. Et on pense que l'emploi (les chiffres pour le 3ème trimestre seront connus le 4 novembre, NDLR) continuera de bien se porter au troisième trimestre", souligne-t-il.
Les sorties de Pôle emploi en forte baisse
L'Insee prévoit encore 58.000 créations nettes au second semestre, un chiffre encore conséquent même si nettement inférieur au premier semestre (+187.000 emplois salariés). "La stabilisation du nombre de demandeurs d'emploi pourrait être aussi la conséquence de retour d'inactivité de personnes qui reviennent sur le marché du travail quand il est dynamique. Tout cela reste assez flou", reconnait Éric Heyer.
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D'ailleurs, les entrées à Pôle emploi en catégories A, B et C ont continué de légèrement diminuer sur le trimestre (-0,8%), avec une forte baisse des entrées pour licenciement économique (-14,5%). En revanche, les sorties de Pôle emploi ont fortement baissé (-5,5%).
Incertitude sur l'évolution de l'emploi et du chômage
En catégorie A, le nombre de demandeurs d'emploi est en hausse de 1,5% trimestre pour les moins de 25 ans (-16,1% sur un an). Il reste stable pour les 25-49 ans et recule de 0,7% les 50 ans et plus (-9% sur un an). Autre bonne nouvelle, sur le front du chômage longue durée, le nombre de demandeurs d'emploi inscrits depuis un an ou plus diminue de 2,2% au troisième trimestre (-14,4% sur un an) à 2,369 millions (catégories A, B et C). La part des demandeurs d'emploi inscrits depuis un an ou plus atteint 46,3% (-3,8 points sur un an).
Cette incertitude sur l'évolution de l'emploi et chômage ne manquera pas d'être mise en avant par les syndicats opposés à la nouvelle réforme de l'assurance chômage qui prévoit de faire évoluer les règles en fonction de l'état du marché du travail. Le Sénat a adopté mardi soir en première lecture le projet de loi qui permettra cette modulation. Elle fait l'objet d'une concertation entre le gouvernement et les partenaires sociaux qui "devrait durer six à huit semaines", a précisé le ministre du Travail Olivier Dussopt.