En raison de la crise de l’énergie, la centrale à charbon de Saint-Avold (Moselle) va devoir redémarrer. Alors qu’elle avait définitivement fermé le 31 mars dernier, l’État lui a demandé de relancer sa production pour cet hiver. La direction a donc dû convaincre ses anciens salariés de revenir sur site jusqu’en mars 2023. Et même si la plupart sont heureux de reprendre leur activité, ils sont sceptiques quant à ce redémarrage.
"J’ai l’impression qu’on a déterré un cadavre"
Au cœur de la centrale, des dizaines de camions déchargent à nouveau des centaines de milliers de tonnes de charbon. Une montagne noire d’une quinzaine de mètres s’est déjà formée. Tout le monde travaille d’arrache-pied. "On est content de revenir parce que ça fait de l’activité", admet Sylvain Krebs, responsable du parc.
Mais cet ancien salarié est tout de même un peu amer. "Pour moi, on a déterré un cadavre", lance-t-il. "Les 210.000 tonnes de charbon que vous voyez, ça va faire du CO², on le sait", soupire-t-il. "On va être obligé de le faire pour le bien de la nation, mais c’est vraiment parce que [l’État] nous le demande", conclut-il.
De grosses primes pour faire revenir les salariés
Presque tous les anciens salariés ont accepté de sortir de leur congé de reclassement ou de leur retraite anticipée, appâtés notamment par une prime mensuelle pouvant aller jusqu’à 5.800 euros. "Sur nos 69 salariés licenciés fin mars dernier, 68 sont de retour", précise Camille Jaffrelo, porte-parole de GazelEnergie, le propriétaire du site. Une situation inédite : "C’est la première fois qu’on demande à une entreprise privée de réembaucher des salariés qu’on vient de licencier", rappelle-t-elle.
Redémarrer la centrale juste pour cet hiver, à moins que…
Sur demande de l’État, la production d’électricité redémarrera donc début octobre et en théorie juste pour cet hiver, jusqu’au 31 mars. Mais les salariés et la direction ont de sérieux doutes à ce sujet. "Qu’est-ce qui aura changé d’ici là ?", se demande Sylvain Krebs. "Vous croyez que la guerre en Ukraine sera finie ? À mon avis, on est reparti pour deux ans", prédit le responsable du parc à charbon.
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"Il y a une chose qui est sûre, c’est qu’on ne veut pas que nos salariés revivent ce qu’ils ont vécu au mois de mars dernier", ajoute très fermement Camille Jaffrelo. "On a donc demandé à avoir une vision claire pendant l’hiver pour pouvoir leur dire si oui ou non ils seront présents à la centrale l’hiver prochain", insiste la porte-parole du groupe.
Tous espèrent surtout que les nouveaux projets de la centrale autour des énergies renouvelables ne seront pas retardés.