La question du dérapage des finances publiques et d'éventuelles dissimulations par l'ancien gouvernement fait l'objet de débats intenses à l'Assemblée nationale. Ce mercredi, la Commission des Finances, présidée par Éric Coquerel (LFI), devra décider si elle souhaite s'armer de pouvoirs d'enquête pour explorer les causes profondes de la dérive budgétaire.
Une proposition sur la table de la commission des finances
La proposition sera mise à l’ordre du jour lors d’une réunion à l’Assemblée nationale mercredi à 17h00, juste avant l'examen du projet de budget 2025. Éric Coquerel, président de la Commission des Finances, a exprimé son souhait de doter la commission de pouvoirs d'enquête pour "étudier les causes de la variabilité des prévisions fiscales et budgétaires et de l'évolution des déficits publics ces dernières années". Cette demande, si elle est approuvée, pourrait permettre d'analyser en profondeur les raisons derrière le glissement des déficits.
Philippe Brun, vice-président PS de la Commission des Finances, soutient également cette initiative, affirmant que le déficit aurait été "volontairement caché" par l’ancien gouvernement.
Des pouvoirs d'enquête : une demande rare mais possible
Bien qu'une telle demande ne soit pas courante, elle n'est pas inédite. En 2018, la Commission des Lois, alors présidée par Yaël Braun-Pivet, avait déjà sollicité des pouvoirs d'enquête pour traiter l’affaire Benalla. Si la Commission des Finances suit cette voie, elle obtiendra des pouvoirs tels que la convocation obligatoire de témoins, des pouvoirs d'investigation, et la possibilité de poursuites en cas de faux témoignage.
Cependant, l’obtention de ces pouvoirs n’est pas automatique. La demande sera d’abord transmise à la présidente de l’Assemblée nationale, puis elle sera affichée et notifiée. Si un président de groupe, de commission, ou le gouvernement s'y oppose, cela pourrait déclencher un débat dans l’hémicycle.
Une commission d’enquête réclamée
Éric Ciotti, chef de file de l’Union des Droites pour la République (UDR) associée au Rassemblement national, souhaite également ouvrir une enquête. Il veut examiner les dérives des finances publiques et déterminer si des "dissimulations" sont imputables aux gouvernements précédents sous Emmanuel Macron. Éric Ciotti a d’ailleurs annoncé son intention d’utiliser son "droit de tirage", un mécanisme permettant à un groupe parlementaire de créer une commission d’enquête après un simple examen de recevabilité.
Cette initiative accentue encore la pression sur le gouvernement actuel, alors que les chiffres officiels montrent un déficit public atteignant 6,1% du PIB pour 2024, bien au-dessus des prévisions initiales de 5,1% et du seuil des 3% fixé par l'Union européenne.
Selon des informations de France 2, des notes internes de Bercy avaient déjà alerté sur un dérapage des comptes publics dès l’automne 2023. Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, s’est montré évasif face à ces révélations, affirmant simplement dans un message que "la vérité apparaîtra plus tard".
De son côté, Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes, a exprimé son souhait de faire toute la lumière sur la manière dont ce déficit a pu se produire. Il a assuré qu’il était crucial de comprendre les causes de cette dérive pour éviter qu'elle ne se reproduise.
Un plan de redressement ambitieux
Face à la situation, le Premier ministre Michel Barnier s'est engagé à ramener le déficit à 5% du PIB d’ici 2025. Le gouvernement a annoncé un plan de redressement de 60 milliards d’euros, comprenant 40 milliards d'économies sur les dépenses publiques et 20 milliards d'euros de recettes supplémentaires provenant d’impôts. Ces mesures seront intégrées dans le projet de budget 2025.
La semaine qui s'annonce pourrait marquer un tournant dans l’exploration des causes de la dérive des finances publiques et dans l’issue des débats parlementaires sur ce sujet délicat. Les pouvoirs d’enquête, s’ils sont octroyés, pourraient donner aux députés les moyens de mieux comprendre l’origine de ce dérapage et d’éclairer les Français sur l'état réel des finances publiques.