La "loi spéciale" définitivement adoptée, le Sénat appelle à voter au plus vite un budget 2025
Faute de budget pour l'année 2025, le Parlement a définitivement adopté ce mercredi une "loi spéciale" en urgence pour éviter un "shutdown". Adoptée à l'unanimité par le Sénat, après l'avoir été par l'Assemblée nationale lundi, ce texte permettra à l'État d'assurer ses fonctions essentielles au début de 2025.
La "loi spéciale", palliatif budgétaire soumis en urgence après la censure du gouvernement Barnier, a été définitivement adoptée mercredi au Parlement après un ultime vote du Sénat, déterminé à doter au plus vite le pays d'un budget pour 2025.
Pas de "shutdown"
Dans l'attente de la constitution d'un gouvernement de plein exercice autour de François Bayrou et surtout d'un véritable budget pour l'année 2025, le Parlement pare au plus pressé avec ce projet de loi atypique, qui autorise l'exécutif à prélever l'impôt et à emprunter pour financer l'Etat et la Sécurité sociale.
Pas de "shutdown", donc, car sans surprise, les sénateurs l'ont adopté à l'unanimité des 345 votants, sans modifier la version votée lundi par l'Assemblée nationale. Sa promulgation in extremis avant le 31 décembre est donc assurée. "Cette loi spéciale donne tout ce qu'il faut à l'État pour assurer ses fonctions essentielles au début de 2025, mais rien de plus. Elle devra être complétée le plus rapidement possible" par un budget, a estimé le rapporteur général de la commission des finances au Sénat, Jean-François Husson (Les Républicains).
Comme à l'Assemblée nationale, les débats ont tourné autour de la question de la "facture de la censure", les soutiens de Michel Barnier tentant de renvoyer les oppositions à leur responsabilité dans l'interruption des débats budgétaires. "Notre déficit est toujours là, notre dette est toujours là. L'urgence budgétaire est toujours là. Elle ne fera, avec les jours et avec les semaines, que s'aggraver", a lancé le ministre démissionnaire de l'Economie Antoine Armand.
La gauche, minoritaire au Sénat, s'est insurgée contre ces reproches. Le communiste Pascal Savoldelli a épinglé "une funeste séquence de communication destinée à faire peur à nos compatriotes", quand le socialiste Thierry Cozic a fustigé les décisions successives d'Emmanuel Macron depuis la dissolution, causes selon lui d'un "coût astronomique" pour les finances publiques. "Les mêmes causes produiront les mêmes effets" et "aboutiront à la même chute de François Bayrou", a appuyé l'écologiste Thomas Dossus.
Quel budget pour 2025 ?
Autre sujet sensible, l'indexation du barème de l'impôt sur le revenu sur l'inflation. Cette proposition, déjà faite par les oppositions à l'Assemblée nationale, a là encore été déclarée irrecevable en raison du périmètre très restreint de cette "loi spéciale", réduite aux urgences budgétaires. Mais cela pourra être corrigé à temps si un budget en bonne et due forme est adopté dans le courant du premier trimestre 2025.
De nombreuses voix au Sénat, dominé par une alliance de la droite et du centre, ont d'ailleurs saisi ce débat sur la loi spéciale pour appeler à ce que les débats budgétaires reprennent là où ils s'étaient arrêtés au moment de la censure du gouvernement de Michel Barnier, sans dépôt d'un nouveau projet de loi de finances. "Cela permettrait de tout rediscuter, mais dans un délai plus raisonnable" que s'il fallait repartir à zéro avec un nouveau budget, a recommandé le président socialiste de la commission des Finances, Claude Raynal.
"Repartir de la feuille blanche pour bâtir un nouveau budget, cela signifierait qu'il n'y aurait pas de budget avant avril au plus tôt", s'est inquiété le sénateur LR Stéphane Sautarel, craignant un calendrier qui "creuserait encore davantage le déficit". Mais une partie de la gauche - communistes, écologistes - ne l'entend pas de cette oreille: "Il faut revoir la copie", a lancé M. Savoldelli, souhaitant que le Parlement "ne reprenne pas des travaux comme si rien ne s'était passé".
Le Sénat compte en parallèle poursuivre une mission de contrôle du dérapage budgétaire, lancée depuis près d'un an, en l'élargissant notamment à la question des dépenses que l'exécutif pourra engager par décret grâce à cette "loi spéciale". Leur périmètre reste flou même s'il devra être limité à un "minimum de crédits" jugés "indispensables".
Les ministres ont néanmoins précisé que les aides à Mayotte, dévastée par un cyclone, rentraient dans le champ d'un motif "d'urgence caractérisée".