Le groupe informatique français Atos, en pleine déconfiture depuis plusieurs années, a encore vu son avenir s'assombrir mardi 19 mars avec l'arrêt par Airbus des négociations menées en vue du rachat d'une partie de ses activités, censé lui apporter de l'argent frais. Intéressé par les activités "Big Data" et Sécurité d'Atos, l'avionneur européen a choisi de mettre un terme aux discussions annoncées en janvier, "après un examen attentif de tous les aspects d'une éventuelle acquisition", a-t-il indiqué dans un communiqué.
Une dette de plus de 3,6 milliards d'euros
Quelques semaines après que les discussions menées entre Atos et le milliardaire tchèque Daniel Křetínský pour lui céder une de ses branches ont déjà échoué, c'est un nouveau coup dur pour un des anciens fleurons de la "tech" française, dont le niveau d'endettement affole les investisseurs, avec 3,65 milliards d'euros d'emprunts et obligations à rembourser ou refinancer d'ici fin 2025. Or, il avait précédemment indiqué que les discussions avec Airbus concernaient un périmètre dont la valeur d'entreprise oscillait entre 1,5 et 1,8 milliard d'euros.
Dans un communiqué distinct, Atos a confirmé la nouvelle et précisé qu'il "analyse la situation" qui en résulte. Le groupe a ajouté qu'il "évalue activement les alternatives stratégiques qui prendront en compte les impératifs de souveraineté de l'Etat français". Atos possède en effet des supercalculateurs, notamment utilisés dans la défense et le nucléaire, des secteurs cruciaux. Dans l'immédiat, l'interruption des discussions concernant BDS entraîne le report sine die de la publication des résultats annuels 2023 de l'entreprise, prévue mercredi et déjà repoussée une première fois fin février, après la fin des négociations avec Daniel Křetínský.
"L'annonce du retrait d'Airbus a été un choc parce que c'est la deuxième fois en très peu de temps qu'un projet de rachat tombe à l'eau. Le problème aujourd'hui est un problème de dette. La première chose que l'on espère, c'est que tous ces délires qui amènent à un démantèlement du groupe s'interrompent", s'inquiète Karine Dran, coordinatrice de la CFE-CGC, premier syndicat d'Atos.
Le groupe sous surveillance
Déjà morose, l'avenir du groupe devient encore un peu plus flou. Le projet de restructuration, entamé avec la scission d'Atos en deux entités annoncée à l'été 2022, patine et les investisseurs n'ont guère de motifs d'espoir. Ces nouvelles secousses se sont donc aussitôt répercutées sur le cours de l'action Atos à la Bourse de Paris. Depuis le début de l'année, sa dégringolade frôle les 70%.
Le groupe avait par ailleurs annoncé début février la nomination d'une mandataire ad hoc, Hélène Bourbouloux, qui s'est notamment chargée des dossiers Casino et Orpea. Celle-ci s'est vu confier la mission de négocier avec 22 établissements bancaires, sous l'oeil attentif de Bercy. "Nous suivons étroitement les négociations avec les financeurs du groupe", avait ainsi indiqué la secrétaire d'État chargée du Numérique, Marina Ferrari, interrogée à l'Assemblée nationale fin février.
Pas de signe d'alerte pour les JO
Dans les prochains mois, Atos doit aussi être un des piliers de l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques, notamment en hébergeant les données personnelles des participants et en fournissant ses services en matière de cybersécurité. Interrogé mardi par Le Figaro pour savoir si la situation actuelle du groupe pourrait avoir des répercussions sur ces événements sportifs planétaires, le directeur général de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi), gendarme français de la sécurité informatique, s'est voulu rassurant.
"Évidemment, nous avons une vigilance particulière compte tenu des difficultés que la société a pu rencontrer mais je n'ai aujourd'hui aucun signe d'alerte lié à la situation du groupe qui se répercuterait sur la sécurité de ce qu'ils font pour les Jeux. Nous les suivons de près pour s'assurer qu'il n'y a pas de dérives. Mais il n'y en a pas aujourd'hui", a affirmé Vincent Strubel.