Dans notre système de santé, deux payeurs remboursent les soins aux patients : la Sécurité sociale et les complémentaires santé. Tout ça pour un seul acte. Ne pourrait-on pas simplifier ce modèle ? C'est l'idée de la "Grande Sécu", dans laquelle l'assurance maladie prendrait en charge l'intégralité des remboursements de soins. Cela mettrait fin aux mutuelles. L'idée plaît beaucoup à Olivier Véran, qui a commandé un rapport au Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM). Le rapport est attendu pour jeudi.
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Grande Sécu : un surcoût de 20 milliards pour les finances publiques
Cette idée de "Grande Sécu" est une idée qui revient régulièrement. A mon avis, c'est une fausse bonne idée. L'argument de fond des partisans de cette réforme consiste à dire que l'argent qui est aujourd'hui émis par les complémentaires santé dans le marketing et dans la publicité (environ 5 milliards d'euros), pourrait être restitué aux assurés. La Sécu n'aurait plus besoin de faire de pub et n'aurait pas besoin de fonds de marketing puisqu'elle serait toute seule à assurer les remboursements.
Premier détail : selon le HCAAM, cette affaire coûterait au moins 20 milliards d'euros aux finances publiques. Le quoi qui l'en coûte, je l'ai soutenu, c'était super. Mais là, nous ne sommes plus dans le cadre de la crise. Il va peut-être falloir songer à réduire les dépenses publiques.
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Moins de diversité dans les contrats et moins d'innovation
Sur le papier, cette idée d'un seul et même payeur pour un même soin est logique. Et puis, les complémentaires santé ne font pas tout bien. Les personnes âgées, les gens qui ne travaillent pas en entreprise et qui ne sont pas couverts par des contrats collectifs sont moins bien assurés que les autres.
Les complémentaires santé pourraient innover davantage, par exemple dans le domaine de la prévention. Mais en même temps, rien ne nous dit que la Sécu ferait mieux. Je suis un libéral et je n'aime pas les monopoles, qu'ils soient publics ou privés. Je m'en méfie. Alors certes, on économiserait peut-être des frais de gestion, mais on aurait moins de diversité dans les contrats. On aurait sans doute moins d'innovation, aussi, avec une sécurité sociale unique. Souvenez-vous, par exemple, que suite à la crise de la Covid, ce sont les complémentaires santé qui ont décidé de rembourser les soins psychologiques. Ça, c'était une vraie innovation.
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Il faut garder deux sources de financements
Il faut réguler les dépenses de soins. On le fait déjà. D'ailleurs, les complémentaires le font avec les réseaux de soins, mais il faut bien distinguer la régulation et le rationnement. Et la Sécurité sociale, elle fait du rationnement. Les dépenses de santé payées par la Sécurité sociale sont votées chaque année par le Parlement. L'augmentation est de l'ordre de 2% par an. Et en réalité, ce n'est pas beaucoup. Parce qu'avec le vieillissement de la population, avec l'innovation thérapeutique, avec malheureusement la plus grande diffusion des maladies chroniques, on sait bien que le rythme d'augmentation des dépenses de santé devrait être de l'ordre de 3 ou 4% par an minimum si l'on veut avoir un système qui donne satisfaction aux Français. Donc ça représente énormément d'argent.
Quand vous avez un système qui exige autant de financements, il me semble que c'est plus sain d'avoir plusieurs sources de financement. C'est mieux d'en avoir deux : une source de financement public et une source de financement privé. Cela permet de mieux irriguer le système.