L’antienne est connue et revient fréquemment dans le débat politique : les Français ne seraient pas assez flexibles et travailleraient moins, surtout depuis la loi sur les 35 heures. Sauf que la réalité est un peu plus complexe, comme le montre l’Insee dans l’édition 2016 des Tableaux de l’économie française : le travail le week-end est bien plus répandu qu’on ne le pense. Ainsi, presque 40% des Français ont travaillé au moins un samedi dans le mois et plus de 20% le dimanche. Et ce ne sont pas forcément les moins diplômés qui se retrouvent au travail le dimanche.
Un travailleur sur quatre en horaires décalés. Le triptyque métro–boulot–dodo du lundi au vendredi n’est pas la règle pour tout le monde, loin de là : en 2014, 39% des personnes ont travaillé au moins un samedi dans le mois. Et 21% ont travaillé au moins un dimanche dans le mois. Travailler le week-end est même la règle dans certains secteurs : ainsi, 72% des artisans travaillent le samedi et 73% des agriculteurs le dimanche.
De même, la journée ne commence pas à 9 heures pour tout le monde : 25% des actifs en emploi ont travaillé au moins une fois dans le mois en soirée (entre 20 heures et minuit) et 9% de nuit (entre minuit et 5 heures du matin). Le travail de nuit est avant tout une affaire d’ouvriers, puisque 14% d’entre eux sont concernés contre 8% des salariés, cadres et artisans. En revanche, le travail en soirée concerne avant tout les artisans (38%) et les cadres (35%), et bien moins les ouvriers (20%) ou les employés (19%).
Femmes et diplômés, premiers concernés par le travail dominical. Les femmes seraient moins disposées que les hommes à travailler le dimanche à cause de leurs obligations familiales ? La vérité est tout autre : 19,4% des femmes travaillent au moins un dimanche par mois, contre 17,4% des hommes.
Autre enseignement de cette étude, le travail dominical n’est pas qu’une affaire de petits boulots ou de travail non qualifié. C’est même le contraire : plus on est diplômé, plus on a de chance de travailler le dimanche. Ainsi, alors que le travail dominical ne concerne que 15,3% des actifs sans diplôme, il touche 20,8% des personnes titulaires d’un titre supérieur au bac.
Les fonctionnaires auraient de meilleures conditions de travail que dans le privé ? Là aussi, le constat de l'Insee est plus complexe. Les services de sécurité ou de santé fonctionnant sept jours sur sept, le travail dominical est la norme pour une bonne partie de la fonction publique. Résultat, 29,3% des fonctionnaires travaillent au moins un dimanche par mois, contre 15,3% des travailleurs du privé.
Le travail partiel reste avant tout féminin. De ce côté-là, les chiffres de l’Insee confirment une tendance lourde : le travail à temps partiel concerne avant tout les femmes. Alors que seuls 7,8% des hommes sont à temps partiel, c’est le cas de 30,8% des femmes, c’est-à-dire quatre fois plus. Et ce n’est pas forcément une bonne nouvelle lorsqu’on sait que le temps partiel en France est le plus souvent subi, surtout lorsqu’il n’est pas qualifié.
Les travailleuses françaises sont pourtant en dessous de la moyenne européenne, où 32,8% des femmes sont à temps partiel, une proportion qui dépasse même les 40% dans les pays anglo-saxons. Mais dans ces cas particuliers, cette organisation du temps de travail est bien plus souvent choisie que subie, d’après une étude de la Dares publiée en juin 2013. A l'inverse, c'est dans les pays d'Europe de l'Est que les femmes sont le moins fréquemment à temps partiel.