Des forêts de bras se lèvent, des fumigènes propagent des panaches de fumée rouge CGT : au nord de Paris, électriciens et gaziers camouflent une poignée de collègues qui viennent de couper le courant du Stade de France et du chantier du village olympique, une action afin de protester contre la réforme des retraites. En quelques minutes à peine, jeudi, "l'action a privé d'énergie le village olympique, le quartier au niveau zone commerciale, des data centers et aussi le Stade de France", a déclaré Sébastien Ménesplier, secrétaire général de la CGT énergie, devant la presse conviée pour relayer cette action symbolique du durcissement engagé par les grévistes du secteur cette semaine.
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Environ 300 agents présents pour cette action
"Face à un gouvernement droit dans ses bottes, nous sommes nous aussi droits dans nos bottes (...) J'en appelle à la responsabilité du gouvernement et du président de la République : retirez votre réforme et les électriciens et les gaziers reprendront le travail pour le service public et l'intérêt général", a-t-il ajouté. Environ 300 agents étaient présents pour cette action, dont certains, cagoulés, ont levé les bras et allumé des fumigènes pour mettre à l'abri des regards et des objectifs des caméras ceux qui ont coupé le courant, ce type de coupures sauvages étant illégal.
Enedis dément la coupure de courant au Stade de France
Le distributeur Enedis a démenti jeudi à l'AFP la coupure de courant au Stade de France, malgré la tentative d'agents de l'énergie, qui ont mené cette action pour protester contre le projet de réforme des retraites. "La ligne électrique qui alimente le stade de France n'a pas été coupée", a indiqué une porte-parole d'Enedis, qui confirme en revanche "des coupures" dans la zone commerciale et résidentielle autour du stade, ainsi que sur le chantier du futur village olympique.
La CGT ne conteste pas que son action ait échoué sur le stade lui-même. "Les plans du réseau électrique tels que nous les avions n'étaient probablement pas à jour", a indiqué à l'AFP Frédéric Probel, secrétaire général du syndicat CGT Energie Bagneux, qui faisait partie des organisateurs de cette action.
Rassemblés en début de matinée dans un complexe sportif au nom de Nelson Mandela, à quelques kilomètres à peine, ils ont été convoyés dans cinq cars, pour rejoindre aussi discrètement que possible ce "poste source Ampère", rénové en septembre dernier dans la perspective des Jeux olympiques et du métro du Grand Paris Express.
C'est là qu'arrive l'énergie des centrales nucléaires par le réseau de RTE, dans un poste source RTE/Enedis, avec un gros transformateur, "et il y a plein de câbles qui partent alimenter des quartiers, des entreprises, les gens", explique Frédéric Probel, secrétaire général du syndicat CGT Energie Bagneux.
500 clients privés de courant un bref moment
Les agents ont d'abord interrompu la possibilité pour RTE de manœuvrer et surveiller le poste électrique à distance, une manœuvre qui vaut aujourd'hui à quatre ex-agents du gestionnaire des lignes à haute et très haute tension d'être poursuivis en justice, après avoir été licenciés. D'où les précautions et la venue en nombre pour noyer l'action dans la masse des agents présents. "On a ouvert les interrupteurs de quatre câbles, un qui alimentait la zone commerciale et le Stade de France, un qui alimentait trois data centers, et un qui alimentait le chantier du village olympique", a expliqué Frédéric Probel.
Enedis rapporte à l'AFP qu'un peu plus de 500 clients ont été effectivement privés de courant, mais que le courant a été rétabli immédiatement via des manœuvres à distance pour la plupart d'entre eux, des techniciens travaillant sur place pour "réalimenter les derniers clients". La société dit qu'elle portera plainte, comme à chaque fois.
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Une action votée à main levée au matin
L'action a été votée à main levée quelques heures plus tôt par les agents, dans le gymnase où ils étaient rassemblés, avant d'entonner un chant qui fait fureur chez les agents de l'énergie, depuis le début de la contestation du projet qui pourrait retarder leur départ à la retraite de deux ans, mais aussi supprimer leur régime spécial de retraite : "Emmanuel Macron, si tu continues, il va faire tout noir chez toi !" "On décide ensemble, je ne suis pas derrière chaque salarié, ils sont en colère, c'est un moyen de faire sortir la colère, de faire comprendre qu'on est là, on sert à quelque chose", a expliqué Frédéric Probel.
Cette action était "un rendez-vous important pour la journée de 'sobriété énergétique' qu'on a organisée partout dans le pays", a indiqué Sébastien Ménesplier, selon qui des coupures ciblées ont touché dans toute la France des plateformes logistiques, des centres commerciaux, des industriels.