Devant la pression du gouvernement, les industriels ont fini par céder. Réunis ce mercredi matin à Bercy autour du ministre de l'Économie Bruno Le Maire, les géants de l'agroalimentaire ont accepté de retourner à la table des négociations avec les grandes surfaces. Ces pourparlers annuels, destinés à fixer le prix des produits vendus en rayon pendant un an, s'étaient achevés en février dernier sur une hausse moyenne d'environ 10% des tarifs payés par les enseignes aux industriels. À l'époque, ces derniers se justifiaient en invoquant la hausse des coûts de production (matières premières, énergies...) mais aujourd'hui, certains indicateurs affichent des tarifs moins prohibitifs. Lors de son interview au 20H de TF1 lundi, Emmanuel Macron a justement pointé du doigt ces industriels qui auraient "vite répercuté la hausse" des prix mais "moins vite répercuté la baisse".
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En temps normal, les prix sont fixés pour une durée d'un an, sans possibilité de renégocier. Mais l'inflation en a décidé autrement. Cette entorse à la loi peut-elle conduire à la baisse tant attendue des prix dans les rayons ? "C'est certain, oui", répond Rodolphe Bonnasse, expert de la grande distribution. Car les distributeurs ont plus d'un tour dans leur sac pour convaincre les industriels, assure-t-il : "Les enseignes peuvent remettre en cause les prix proposés par les grands groupes car eux-aussi font fabriquer et vendent des produits à leurs marques distributeurs. Donc ils peuvent très bien dire aux industriels 'on a bien vu que le cours du blé avait été divisé par deux, donc comment justifiez-vous cette hausse des prix ?'"
Un travail d'orfèvre
Pour autant, les négociations s'annonces âpres. Car si certaines matières premières ont eu tendance à se stabiliser, voire à baisser, le coût de la main d'œuvre reste lui très élevé. Un travail d'orfèvre attend donc les deux parties. "Il va falloir décortiquer chaque ligne", souligne Rodolphe Bonnasse. Et si les baisses de prix devraient bel et bien advenir, croire à une inflexion spectaculaire paraît bien utopique. "Quand vous achetez une baguette de pain, 7% du prix correspond au cours du blé. Donc même si ce dernier a été divisé par deux, ça n'aura un impact que sur 7% du prix. Au lieu de payer votre baguette un euro, vous la paierez 97 centimes", illustre le spécialiste. En clair, le retour des prix en vigueur avant le déclenchement de la guerre en Ukraine n'apparaît pas à l'horizon.
Néanmoins, les industriels restent sous le coup de la menace brandie par Bruno Le Maire à l'encontre des plus réticents d'entre eux. "Nous emploierons tous les instruments à notre disposition, y compris l’instrument fiscal, pour récupérer des marges qui seraient des marges indues faites sur le dos des consommateurs", avait assuré le ministre de l'Économie la semaine dernière. Un argument de poids, assure Rodolphe Bonnasse qui tient toutefois à nuancer : "Ce sont des géants mondiaux et à l'échelle de leur vision planétaire, la France reste un petit pays. Même si nous restons un marché significatif pour Nestlé ou Coca-Cola, ces entreprises pourront absorber une difficulté commerciale dans l'Hexagone. En revanche, si demain nous pouvons bénéficier d'une posture européenne sur le sujet, ce serait différent", conclut-il.