Les années passent mais certaines choses ne changent pas au Mondial de l’Auto de Paris : sur les stands des constructeurs, ce sont toujours les concept-cars qui attirent l’attention des visiteurs. Ces voitures "conceptuelles" au look futuristes ne sont pas vouées à se retrouver sur les routes dans le futur mais elles représentent la part de rêve inhérente à l’automobile. Les concept-cars ne servent cependant pas qu’à ébahir les as du volant : ils esquissent le futur des constructeurs.
Des produits d’appel de luxe. Dans un salon comme celui de Paris, qui se tient cette année du 4 au 14 octobre, les concept-cars sont malgré tout essentiels, en premier lieu, pour l’image des constructeurs. Généralement placés au centre des stands, parfois en hauteur, ces modèles extravagants exercent un pouvoir d’attraction sur les visiteurs que les voitures du quotidien ne peuvent contester. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à voir la foule qui se masse sur le stand Renault, qui présente trois concept-cars autonomes. Une masse de visiteurs qui, derrière, se retrouve à déambuler sur le stand au milieu des véhicules de la gamme grand public. Produits d’appel de luxe, les concept-cars peuvent donc, au bout de la chaîne, déclencher l’achat d’une voiture.
Faire rêver est une chose mais ce n’est pas le principal intérêt des concept-cars sur les salons. Les constructeurs observent à la loupe les réactions des visiteurs et des partenaires. "Les retours de salon, l’attention que les gens peuvent porter à divers éléments de la voiture mais aussi les développements de nos designers", peuvent présider à la destinée d’un concept-car, explique à Europe 1 Stéphane Boutier, directeur marketing de Mercedes. L’Allemand présente cette année la Vision EQ Silver Arrow, un modèle électrique racé, réinvention de la W125 Rekordswagen, détentrice depuis 1938 du record de vitesse du kilomètre lancé.
Des laboratoires pour la voiture de demain. Il suffit de jeter un œil au bolide pour comprendre qu’on ne la verra jamais circuler sur nos routes. Dans ce cas, à quoi sert-il de présenter ce genre de voitures ? "Ça permet principalement de tester des technologies. Et puis, ce sont des créations des designers pour montrer des directions d’évolution du design automobile", précise Stéphane Boutier. Même son de cloche du côté de Renault. Au risque d’en décevoir certains, le taxi EZ-Go, l’utilitaire EZ-Pro et la limousine EZ-Ultimo présentés par le Français ne verront jamais le jour tels que montrés au salon. "Comme tout concept-car, le but n’est pas de les sortir en l’état. Il est plutôt d’apprendre, notamment sur le plan technologique", appuie Guillaume Eurin, chargé du développement des aides à la conduite et des véhicules autonomes au sein du groupe Renault.
La technologie, voilà le nerf de la guerre des concept-cars, véritables laboratoire des véhicules de série de demain. "Chez Mercedes, ils permettent de développer la vision du futur, à moyen et long terme", avance ainsi Stéphane Boutier. En misant sur un bolide électrique, le constructeur allemand espère sans doute repousser les limites de performance des moteurs électriques. Du côté de chez Renault, on entend plutôt progresser sur les technologies de conduite autonome. "Il faut savoir que sur ce genre de véhicule, pour capter tout l’environnement extérieur, on peut avoir besoin facilement de 20, 30 voire 40 capteurs. Cela se fait en collaboration avec le design, les concept-cars nous permettent d’apprendre à travailler ensemble", estime Guillaume Eurin.
" Au total, ce sont peut-être 10 à 20% des technologies du concept-car qui se démocratiseront "
Des designs et des technologies qui restent. Pour avancer, les constructeurs tentent beaucoup de choses sur leurs concept-cars. "Au milieu du volant de l’EQ, il y a un écran tactile, et le compteur est remplacé par un écran 3D. Ce sont des innovations qui peuvent très bien arriver dans nos voitures dans quelques années", avance Stéphane Boutier. "Au total, ce sont peut-être 10 à 20% des technologies placées dans ce concept-car qui se démocratiseront dans le futur", ajoute le directeur marketing de Mercedes. Illustration concrète de l’utilité technologique de ces modèles : en 2008, Citroën avait présenté la GT, une voiture de course équipée d’une pile à hydrogène, une technologie désormais employée dans les moteurs de certaines voitures électriques.
Cette année, Renault compte s’appuyer sur EZ-Go, EZ-Pro et EZ-Ultimo pour avoir, dans les véhicules du quotidien, "des systèmes de conduite autonomes graduellement disponibles, jusqu'au niveau 4 (où le conducteur devient facultatif, ndlr), à partir de 2025", annonce Thierry Bolloré, directeur adjoint du groupe, à Europe 1. En plus de tester des technologies, le design des concept-cars peut également leur survivre. "Un phare qui aurait fait l’objet d’une étude poussée de l’équipe design et qui aurait des retours positifs, pourrait tout à fait se retrouver sur la voiture de monsieur Tout-le-monde demain", complète Guillaume Eurin.
Et si Mercedes et Renault ont opté pour des concept-cars volontairement très futuristes, d’autres constructeurs misent sur des modèles plus "réalistes". Pour le salon de Paris, Peugeot a ainsi décidé jouer la carte de la nostalgie avec la E-legend, un clin d’œil appuyé à la… 504, un des modèles les plus vendus de la marque au lion. Un concept-car entre hommage (on retrouve le capot élancé de la 504, ses sièges rembourrés en velours) et modernité (les lignes sont épurées et la voiture est bardée d’écrans). Résultat, la E-legend a beau être futuriste, elle ne choquerait pas si on la croisait sur la route dès à présent.