La réforme de la SNCF n'est pas encore tout à fait sur les rails. Le gouvernement présentera ses ordonnances dans une semaine, en attendant, les discussions se poursuivent avec les syndicats qui agitent la menace d'une grande grève nationale. En cause notamment : la fin annoncée des embauches au statut des cheminots, largement présenté comme un statut de "privilégiés". "Je voudrais pousser un coup de gueule. En ce moment on est vraiment dans une période de 'SNCF bashing' et de 'cheminot bashing', et j'en ai assez ! Je trouve que c'est nul et inutilement méchant", a réagi mercredi matin sur Europe 1, Guillaume Pepy, le président de la SNCF.
Pas de privilèges... "Aujourd'hui, j'ai la responsabilité de conduire une entreprise formidable. Elle a, comme toutes les entreprises, des défauts et des qualités, mais je ne supporte pas qu'elle fasse l'objet d'un bashing et de commentaires qui n'ont rien à voir avec la réalité", défend-il. "J'entends les commentaires, pas ceux du gouvernement, ils ne sont pas en cause", précise le responsable qui "entend que les cheminots sont des fainéants", et veut donc dénoncer les caricatures : "Non, il n'y a pas de prime de charbon, non il n'y a pas 28 jours de RTT. En revanche, il y a de l'engagement, de la compétence et des efforts", martèle-t-il.
Une prise de position qui intervient alors même que les syndicats ont reproché à Guillaume Pepy son silence quand le gouvernement a annoncé vouloir s'attaquer au statut des cheminots. "Monsieur Pepy a mis du temps à sortir pour expliquer que les cheminots n'étaient pas des privilégiés, des nantis. Il nous a laissé face à la vindicte populaire", a notamment déploré auprès d'Europe 1 Bruno Poncet, secrétaire fédéral de SUD Rail. Ce syndicaliste reproche également au dirigent de reprendre à son compte l'argumentaire du gouvernement, qui présente le statut des cheminots comme l'une des causes principales de l'endettement du service public. "Monsieur Pepy, aujourd'hui, joue le jeu du gouvernement, à croire qu'il leur souffle certaines choses à l'oreille", pointe-t-il.
... Mais "il faut que ça change". Dans un contexte d'ouverture prochaine du rail français à la concurrence, le dirigeant se montre en effet plutôt critique à l'égard du sacro-saint statut, véritable ligne rouge pour les représentants des salariés. "Dans la concurrence, la SNCF ne peut pas être la seule entreprise à embaucher au statut. C'est clair. Le statut comporte des rigidités. Aujourd'hui, par exemple, quand on embauche un jeune dans un métier, on est obligé de l'embaucher au premier niveau, même si cette personne a un diplôme ou une expérience qui lui permettrait d'être embauchée au deuxième, troisième ou quatrième niveau. Ça, il faut que ça change", estime Guillaume Pepy, toujours au micro d'Europe 1. "La vraie garantie de l'emploi, c'est les compétences des gens et c'est l'avenir de l'entreprise, le fait qu'elle marche, qu'elle avance", assure-t-il.
Faire "gagner" la SNCF. "Pour que la SNCF reste elle-même, c'est-à-dire un grand service public pour les Français, il faut qu'elle se réinvente", plaide encore Guillaume Pepy. "La concurrence, il ne faut pas en avoir peur […] mon travail sera de faire en sorte que, dans la concurrence, la SNCF gagne", conclut-il.