Le Qatar a annoncé samedi la signature d'un important contrat avec le géant gazier et pétrolier français TotalEnergies pour le développement du plus grand champ de gaz naturel au monde, sur fond de crise de l'énergie en Europe provoquée par la guerre russe en Ukraine. "QatarEnergy (QE) a sélectionné TotalEnergies comme premier partenaire étranger pour le développement du champ de gaz naturel North Field South (NFS)", a affirmé le géant qatari des hydrocarbures dans un communiqué.
Le géant français a déjà signé un accord de plus de 2 milliards de dollars avec Doha en juin pour le développement du projet North Field East (NFE). Le North Field South et le North Field East sont des projets d'extension du champ offshore North Field, le plus grand gisement de gaz naturel au monde que le pays du Golfe partage avec l'Iran.
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Un investissement nécessitant 1,5 milliard de dollars supplémentaires
L'accord de samedi a été signé à Doha par le ministre qatari de l'Energie et PDG de QE, Saad Sherida al-Kaabi, et Patrick Pouyanné, PDG de TotalEnergies. Ce nouvel accord nécessitera un investissement de 1,5 milliard de dollars supplémentaires, a affirmé Patrick Pouyanné lors d'une conférence de presse conjointe avec le ministre qatari. TotalEnergies "aura un rôle stratégique renforcé" dans le développement gazier au Qatar, a assuré Saad Sherida al-Kaabi. Selon QE, la participation de TotalEnergies dans ce projet est de 9,375%, alors que le Qatar a fixé à 25% la part totale des sociétés étrangères.
"D'autres partenaires seront sélectionnés à un stade ultérieur", a rapporté de son côté l'agence de presse qatarie QNA. North Field représente environ 10% des réserves de gaz naturel connues dans le monde, selon QE. Il s'étend sous la mer jusqu'au territoire iranien, où les efforts de la République islamique pour exploiter leur partie de ce gisement sont entravés par les sanctions internationales.
Le Qatar est déjà l'un des principaux producteurs de GNL au monde, avec les États-Unis et l'Australie. Doha souhaite augmenter sa production de plus de 60% pour atteindre 110 millions de tonnes d'ici à 2027. La Corée du Sud, le Japon et la Chine en sont les principaux clients, l'Europe s'étant longtemps opposée aux accords à long terme souhaités par l'émirat. Mais suite à la guerre en Ukraine, les importateurs de GNL s'empressent de sécuriser des alternatives au gaz russe.
"Pour assurer l'approvisionnement, il y a un prix (à payer)"
L'arrêt total des livraisons de gaz russe via le gazoduc Nord Stream depuis le 2 septembre fait craindre en Europe une grave crise énergétique cet hiver, poussant les gouvernements européens à appeler la population et les entreprises à réduire leur consommation. "Nous avons besoin de nouvelles capacités, c'est certain et (cet investissement) tombe à point", a affirmé samedi le PGD de TotalEnergies.
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"La plupart des dirigeants dans le monde connaissent maintenant (l'importance) du GNL", a-t-il ajouté, précisant que les pays européens doivent faire plus d'investissements à long terme et payer un prix possiblement plus élevé pour sécuriser leur approvisionnement énergétique. "Pour assurer l'approvisionnement, il y a un prix (à payer)", a-t-il dit.
Cette annonce intervient alors que le chancelier allemand Olaf Scholz doit entamer samedi une tournée dans le Golfe, où il doit se rendre en Arabie saoudite, aux Emirats arabes unis et au Qatar. Saad Sherida al-Kaabi, qui doit rencontrer Olaf Scholz dimanche, a refusé de donner plus de détails sur les négociations en cours avec les pays européens, mais a affirmé que certains de ces pourparlers étaient "dans un état plus avancé" que d'autres.
Il a par ailleurs confirmé que Doha est en négociation avec la Grande-Bretagne. En juillet, le géant énergétique britannique Shell a été choisi comme cinquième et dernier partenaire étranger pour développer le projet North Field East, où la production doit débuter en 2026. À travers une co-entreprise avec QE, la compagnie britannique a pris une part de 6,25% dans le projet, équivalente à celle du français TotalEnergies et de l'américain ExxonMobil. L'Italien Eni et l'Américain ConocoPhillips ont chacun pris des parts de 3,125%.