La dualité du marché du travail s'est accentuée depuis dix ans, avec un poids croissant des contrats courts et une réduction de leur durée, une instabilité qui fragilise davantage les plus précaires, selon une étude de France Stratégie publiée lundi.
Le chômage de longue durée en forte augmentation. Plus on connaît le chômage, plus la durée des contrats se réduit, plus les chances de trouver un CDI diminuent, quand à l'inverse les personnes en CDI n'ont qu'une faible probabilité (2%) de connaître le chômage, relève l'organisme de réflexion rattaché à Matignon. Les allers-retours entre emploi et chômage sont aussi plus importants depuis la crise, avec une hausse particulièrement marquée des transitions "sans sortie durable du chômage" : le chômage de longue durée (plus d'un an) a ainsi fortement augmenté depuis 2008, passant de 2,5% de la population active à 4,3% en 2015.
Les contrats courts, des "variables d'ajustement". Ces évolutions reflètent un changement des modes de gestion de la main d'oeuvre par les entreprises, pour qui les contrats courts constituent des "variables d'ajustement", explique France Stratégie. De 2008 à 2014, près de six emplois retrouvés sur dix le sont en CDD ou en intérim, contre à peine quatre sur dix au début des années 1990.
Réembauches en CDD chez le même employeur. La forte progression des CDD dans les embauches (86%) découle essentiellement d'un raccourcissement de la durée moyenne des contrats, avec un phénomène de réembauche chez un même employeur plus fréquent : quatre personne sur dix embauchées en 2012, contre une sur quatre en 2000. Ces réembauches, effectuées sur les contrats de moins d'un mois, frappent en premier lieu les métiers de services, particulièrement ceux autorisant les CDD d'usage (hôtellerie-restauration, services à la personne, événementiel, etc.). À l'autre bout du spectre, la banque-assurance apparaît comme le secteur où la stabilité dans l'emploi est la plus forte.
Cercle vicieux. Parmi les salariés en CDD ou en intérim, ceux qui ont des contrats de moins d'un mois présentent la plus forte probabilité de perte d'emploi. Et les chances de trouver un CDI à l'horizon d'un an diminuent, surtout pour les salariés en intérim (18% entre 2008 et 2014, contre 20% de 2003 à 2008) et pour les chômeurs (13% contre 17%). Cette difficulté d'accéder à l'emploi stable est de plus en plus forte chez les jeunes et les peu diplômés. Au-delà du statut, l'emploi retrouvé l'est souvent à temps partiel ou en temps partiel subi (1,7 million de personnes, soit 800.000 de plus qu'en 1990).