"Bonne nuit maman à demain". Ce sont les derniers mots prononcés par Marina, seule, nue et grelottant de froid dans le sous-sol de la maison familiale, la nuit de sa mort, le 6 au 7 août 2009. Huit jours après le début du procès des parents de la fillette pour actes de torture et barbarie ayant entraîné la mort, Eric Sabatier et Virginie Darras ont raconté mardi la dernière journée de Marina. Deux versions légèrement différentes.
Le couple, actuellement en instance de divorce, s'est affronté par témoignage interposé. Le père s'emporte sur les contradictions dans la version de la mère qui, de sa voix basse et éraillée, maintient ses propos. Lui la regarde, hausse le ton pour avoir des explications. Elle, elle lui tourne le dos, fixant le président et les jurés, répondant d'une voix monocorde.
"Je lui met une gifle, elle se fait pipi dessus"
"Dans ma tête, le but c'était que moi je prenne le maximum pour que mon épouse puisse sortir le plus rapidement pour s'occuper des enfants", explique à la cour le père. Mais aujourd'hui, il s'estime trahi par son épouse. Il a donc dévoilé mardi une chronologie très détaillée de la dernière journée de Marina.
Le 6 août, il raconte avoir découvert Marina punie en rentrant du travail. Elle était "assise sur une chaise, nue, à faire des lignes". Eric Sabatier lui demande pourquoi mais la petite ne répond pas. "Je lui met une gifle, elle se fait pipi dessus", se souvient-il.
"Elle cogne contre la baignoire"
Dans la salle de bain, le père de la fillette la plonge dans un bain froid. Il affirme lui avoir parlé "calmement". Elle ne répond pas. "Je lui donne une claque tellement forte qu'elle cogne contre la baignoire, et en cognant il y a un impact sur le bord", raconte-t-il à la barre. "A ce moment là je suis vraiment énervé". Il lui plonge alors la tête sous l'eau. Pendant ce temps, sa femme Virginie donne à manger aux autres enfants dans la véranda. Lorsqu'elle entre dans la salle de bain, elle met une gifle à Marina. Selon le père, Marina aurait dit vouloir "embêter maman" par son comportement. La mère lui met à son tour la tête sous l'eau.
Une fois le supplice du bain terminé, Marina fait caca sur le tapis de bain. Ils la lavent à nouveau, à l'eau froide. La fillette ressort du bain, glisse sur le sol et se cogne la tête à deux reprises, raconte la mère.
Il est plus de 23 heures. Le reste de la maisonnée est déjà couché. Marina sort enfin de la salle de bain. Virginie Darras lui donne à boire "un verre à moutarde de vinaigre", puis "une cuillère à soupe de gros sel", raconte le père. "Pour l’écœurer", ajoute la mère.
"Bon ça va elle est pas morte"
Le couple emmène la petite fille dormir au sous-sol. Marina a le visage rougi de coups. Elle est nue et grelottante. Pendant la soirée, Eric Sabatier et Virginie Darras boivent. Un peu plus tard, la mère redescend. Marina a à nouveau fait ses besoins sur elle. Elle va la laver dans une douche au sous-sol. Le père pousse l'enfant. Elle se cogne la tête contre une étagère. "Je m'accroupis, elle est un peu groggy", ajoute le père. "Bon ça va elle est pas morte", lui répond alors son épouse, toujours selon Eric Sabatier.
Les sévices se poursuivent encore et encore. Virginie Darras lui donne alors "un coup de raquette sur les abdos, la petite vole jusqu'au mur", précise le père. Ils la laissent en bas "allongée, en position du foetus", et remontent. Eric Sabatier se dit "cassé par l'alcool".
Puis, la mère redescend une dernière fois. Marina lui dit qu'elle a "mal à la tête". Elle lui dit "bonne nuit maman à demain". Mais, Marina meurt dans la nuit.
Le président de la cour d'assises de la Sarthe interroge la mère. "Elle est morte de quoi Marina ?". Dans un sanglot, Virginie Darras répond simplement : "de violences, de tortures".