Ils sont chômeurs, précaires, endettés. Des Français qui n'arrivent plus à faire face. Alors, pour assainir leurs finances, ils tentent le diable. Et rejoignent des réseaux de passeurs pour aider des migrants à rallier l'Angleterre. Une activité qu’ils pensent temporaire et qui se transforme en engrenage infernal, difficile à arrêter. Face à l’ampleur exponentielle du phénomène, policiers et magistrats s’inquiète. Depuis un an, près de 80 personnes ont été interpellées et une quarantaine de cas ont été examinés par la justice.
>> Europe 1 a rencontré François passeur de migrants occasionnel qui a aujourd’hui mis fin à cette activité illégale.
"Comme j’en avais besoin, j’ai dit oui". Un commerce au bord de la faillite, des factures qu’il ne pouvait plus payer : quand François a vu les liasses de billets exhibées par un passeur qui cherchait à le recruter, il s’est laissé tenter. Il a alors effectué un premier passage en Angleterre avec des migrants planqués dans sa camionnette. Puis un deuxième. Un véritable engrenage, jusqu’à son arrestation par la police britannique.
"2.000 euros par personne. Au début j’hésitais quand même, mais comme j’en avais besoin, j’ai dit oui. C’est un engrenage, une fois qu’on est dedans, on a dû mal de partir. Les recruteurs sont tout le temps-là, tous les jours, à nous mettre la pression. Physiquement, déjà, ils sont impressionnants. C’est une mafia. Donc, il faut se méfier, c’est dangereux", raconte François.
Les plus actifs dans le recrutement de ces passeurs occasionnels sur le littoral sont les Asiatiques et les Albanais, qui appâtent les personnes en difficulté, parfois de jeunes chômeurs dans les quartiers pauvres. Emmanuelle Osmond, avocate à Boulogne-sur-Mer, connait bien ces réseaux de recruteurs de passeurs.
"Nous avons affaire à des gangs qui sont armés". "Ils savent parfaitement à qui il s’adressent. Ils savent parfaitement que ce sont des personnes vulnérables, en difficulté financière. On croit avoir affaire à des gens sympathiques, sous couvert d’humanitaire, ils vous disent qu’il s’agit de faire une bonne action. En fait, ce sont des recruteurs, qui brassent des millions d’euros chaque année. Et qui sont extrêmement dangereux, puisque nous avons affaire à des gangs qui sont armés", informe l’avocate.
Quand ils sont arrêtés, les passeurs amateurs, payés par les réseaux, écopent bien souvent de peine de prison avec sursis, ou d’amende. Des sanctions qui suffisent bien souvent à les dissuader de recommencer, confie un policier.