"Faire évoluer (la) Constitution pour permettre aux pouvoirs publics d'agir, conformément à l'état de droit, contre le terrorisme de guerre". Voilà une des annonces effectuées par François Hollande lors de son discours devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles, lundi après-midi. Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne " - et auteur d'un livre intitulé Radicaliser la démocratie : propositions pour une refondation -, a réagi à cette annonce, mardi matin sur Europe 1.
"Il faut adapter la Constitution à la situation actuelle". Pour lui", non la Constitution n'est pas un frein à la lutte contre le terrorisme mais elle ne contient pas toutes les dispositions nécessaires pour permettre de lutter contre la situation actuelle. Elle a été rédigée en 1958 et les crises de l'époque ne sont pas reproductibles aujourd'hui. Il faut donc adapter la Constitution à la situation actuelle".
"C'est la loi des lois". La Constitution étant "le texte fondateur", tout ce qui n'est pas prévu dedans n'est pas possible : "c'est la loi des lois, donc il faut qu'il y ait dedans tous les principes permettant au pouvoir d'exercer ses compétences. Et ce qu'il manque actuellement, c'est la définition d'un régime correspondant aux situations de crise que l'on connait".
Des exceptions inapplicables. Comme François Hollande l'a rappelé lundi, il existe bien deux dispositions d'exception, l'article 16 et l'article 36, mais ils ne seraient plus adaptés, ce que confirme Dominique Rousseau. "Pour le premier, il faut qu'il y ait une interruption du fonctionnement régulier des pouvoirs publics. Ce qui n'est pas le cas, donc on ne peut pas l'appliquer. L'article 36 est sur l'état de siège, utilisé en 1914, par exemple". Et la différence entre l'état de siège et l'état d'urgence, récemment proclamé par le chef de l'Etat ? "Dans le premier, tous les pouvoirs passent au pouvoir militaire. Dans l'état d'urgence, les pouvoirs restent aux mains des autorités civiles, mais ils sont augmentés".
Interrogé sur l'interdiction à un binational de revenir en France ou la déchéance de nationalité souhaitées par François Hollande, le professeur de droit constitutionnel assure en revanche qu'il n'y a "pas besoin de changer la Constitution pour cela. La question tient plutôt au respect des traités internationaux, qui sont au-dessus."
Et de conclure : "c'est utile de toiletter la Constitution, dans la mesure où il manque une arme constitutionnelle".