Les magistrats ne peuvent pas annuler un procès même si l'enquête qui l'a précédé a traîné en longueur, a tranché mercredi la Cour de cassation, après avoir examiné l'annulation rarissime d'un vaste procès pour corruption en 2021. La plus haute juridiction judiciaire a cassé l'annulation du procès dit de "la chaufferie de La Défense", décidée à Nanterre puis confirmée par la cour d'appel de Versailles en 2021.
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Les magistrats de Nanterre puis de Versailles craignaient un procès inéquitable du fait de la durée de la procédure pénale qui s'était étalée sur près de vingt ans. Selon eux, impossible de juger correctement les prévenus sans pouvoir les confronter. Or, l'un d'entre eux est presque centenaire, un autre est atteint de Parkinson... et le bénéficiaire présumé du schéma de corruption, l'ancien sénateur et maire de Puteaux Charles Ceccaldi-Raynaud, est décédé.
"Ne pas être jugé dans un délai raisonnable ne porte pas, en soi, atteinte aux droits de la défense"
Ils avaient alors annulé l'intégralité des actes de procédure. Mercredi, la Cour de cassation a censuré leurs décisions. "Ne pas être jugé dans un délai raisonnable ne porte pas, en soi, atteinte aux droits de la défense", a-t-elle décrété. A l'instar du parquet général qui avait contesté les décisions d'annulation, elle a rappelé que les parties disposaient "de garanties" pour permettre la tenue d'un procès équitable, même en cas de dépassement du délai raisonnable.
Les parties "peuvent influer elles-mêmes sur la durée de la procédure, en demandant que des investigations soient menées ou que l'information judiciaire soit clôturée", a souligné la Cour. "Elles peuvent obtenir réparation en engageant la responsabilité de l'État au titre d'un fonctionnement défectueux du service public de la justice", a-t-elle poursuivi.
Le dossier doit désormais revenir devant la cour d'appel
La Cour a toutefois rappelé que la durée excessive d'une procédure peut "avoir des conséquences sur la valeur des preuves ainsi que sur le choix de la peine". "La Cour de cassation dit aux magistrats qu'il faut aller à marche forcée au procès", a regretté auprès de l'AFP Me Patrice Spinosi, avocat près la Cour de cassation de deux prévenus dans l'affaire de la chaufferie. "La Cour de cassation n'a pas entendu le cri d'alarme des juridictions pénales", a-t-il déploré.
Depuis le cas devenu emblématique de la chaufferie, annulé en janvier 2021, une demi-douzaine de jugements d'annulation ont été rendus. Presque tous frappées d'appel, ils étaient suspendus à l'arrêt de la Cour. En ce qui concerne la chaufferie de la Défense, le dossier doit désormais revenir devant la cour d'appel.